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    "Enseignement ou propagande" est basé sur un livre en préparation dont la parution a été retardée parce que qu’il sera beaucoup plus long et général que prévu (il ne se limitera pas au roman prévu dans un pays imaginaire) ;  livre où l'on parle de scandales dans l'Institution d’Education du dit pays imaginaire, Institution qui y avait remplacé, on comprend pourquoi, le Ministère de l'Instruction Publique.

     

    Il y est question de l'endoctrinement forcené qui y était fait depuis plus de trente ans par tous les moyens, les plus lâches et les plus iniques, sur les élèves autant que chez les enseignants. Par exemple l'embauche de certains enseignants pas très diplômés (i.e. sans concours) mais "pensant bien", dont l'un était un ancien boxeur reconverti un peu en "homme de main" de l’administration régionale d’enseignement (équivalent du rectorat).

     

    Le premier article met en présence deux enseignants imaginaires appelés "adjoints d'enseignement", dont le dit boxeur, qui avaient organisé, dans les classes d'un lycée public et juste à l'avant veille d'une élection présidentielle (je dis bien l'avant veille du scrutin officiel!), un vote où l'on demandait aux élèves de dire pour qui ils voteraient s'ils étaient majeurs, ou bien, s'ils étaient mineurs, pour qui votaient leurs parents...

     

    Le dépouillement eut lieu dans les classes le jour même, pendant que le directeur du lycée (pourtant prévenu de la chose par un professeur hostile à la politique au lycée), "faisait la sieste"...et ne pouvait être dérangé (répondit son épouse au professeur-trouble fête). Les imprimés donnés aux élèves étaient anonymes, mais on sait très bien que les enseignants reconnaissent l'écriture de chaque élève...

     

    Le professeur hostile à la politisation des établissements publics avait bien averti les deux adjoints d'enseignement qu'il ne laisserait pas faire la chose; mais les deux enseignants indélicats, très bien vus du rectorat, passèrent outre. Après le dépôt de témoignages du vote à la garde civile le lundi matin, par le professeur respectueux de la laïcité de l'Ecole, l'ancien boxeur, fou de rage d'avoir été pris la main dans le sac, annonça au dit enseignant qu'il serait ainsi définitivement exclu de toute communication avec tous les collègues du lycée (et même de toute la région) et que personne ne lui adresserait plus la parole (il faut ajouter que ces deux adjoints d'enseignement se réclamaient d'idées et d'un parti qui faisaient tout pour lutter contre l'exclusion et la discrimination...); cependant l'adjoint d'enseignement-ancien boxeur, quelques jours après, préféra tout de même aller prudemment déclarer à la dite garde civile qu'il regrettait ce qui s'était passé  et qu’il s'excusait. En fait de regrets... deux mois après, les deux adjoints d'enseignement cherchèrent à accroître leur vengeance, plutôt mesquinement d'ailleurs, en distribuant, le jour de la petite cérémonie de départ en grandes vacances, un texte dénigrant le professeur qui avait su rester digne de son poste de fonctionnaire d'une Institution Publique, où la politique est aussi immorale qu'interdite; et ils distribuèrent ces papiers dans les casiers des enseignants et professeurs quelques minutes juste avant que le directeur du lycée n'entame son discours de fin d'année scolaire, afin que le professeur mis en quarantaine n'ait pas le temps de répondre au dit papier le dénigrant; le directeur fit même plus: à la rentrée des classes il fit enlever tous les casiers- boîtes à lettres des enseignants et professeurs, sous prétexte qu'on allait installer des casiers plus modernes (ce qui dura près de deux mois...); ainsi le professeur qui avait voulu rester honnête ne put pas répondre aux attaques qu'il jugeait aussi lâches que de mauvais aloi. Pour la petite histoire, dans ce pays imaginaire, la garde civile n'avait pas voulu recevoir un dépôt de plainte officiel, au motif que le nouveau juge départemental responsable d'un tel délit venait d'être nommé par le nouveau président de la République, à qui le fameux vote n'était pas défavorable... et que dans la garde civile, les mesures de rétorsion étaient exemplaires dans ce pays là. Enfin, quatre mois après, l'ancien boxeur adjoint-d'enseignement, apprenant que le professeur qui avait soulevé l'affaire savait très bien que le dit adjoint d’enseignement avait manqué de courage au point d'aller hypocritement "pleurer" à la garde civile (pour ensuite continuer à se venger), frappa le professeur récalcitrant, lequel professeur eut le tort de riposter. En effet, bien qu’un peu plus blessé que l'ancien boxeur, ce fut ce dernier qui fut accompagné officiellement chez le médecin officiel du lycée par l'infirmière du lycée, qui choisit de ne pas faire son devoir pour probablement ne pas aller à l'encontre de l'état d'esprit qui régnait au lycée, patronné par le Syndicat National de l'Enseignement Socialiste, très puissant dans ce pays imaginaire ; bien sûr les deux adjoints d’enseignement, ainsi que d’autres enseignants de connivence, allèrent dans la ville colporter des mensonges, disant que c’était le professeur resté honnête qui avait frappé l’ancien boxeur ! Par la suite ils le dénoncèrent même au « pouvoir éducatif régional » (équivalent du rectorat) et le nouveau proviseur en profita pour truquer le dossier du professeur mis en quarantaine.   

     

     Suite au prochain article sur ce pays imaginaire et à bientôt !

     

     

     


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  • Ce deuxième article (le premier étant: "Les collabos du crépuscule") s'intitule "Le Lycée d'Elise" ; c'est un roman qui fait partie du  livre "Main Basse sur l'Instruction Publique"qui est en cours d'achèvement . 

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        Avertissement :   aux âmes sensibles à l’expression « politiquement correct », je me permets de signaler que cette nouvelle, qui fait partie d’une série d’articles intitulée « Les collabos du crépuscule », risque de ne pas leur paraître « politiquement correcte ». Mais je voudrais que l’on sache que, vu l’entière vacuité de sens de la dite expression qui plaît aux hypocrites, ainsi que son origine des plus sophistes, c’est en parfaite conscience que je présente l’histoire et le texte dans des situations et un vocabulaire que certains pourraient trouver très crus.  Au  Diable lui même ne plaise !

    Certains individus (hommes ou femmes) du roman sont tellement indignes, qu’il est statistiquement quasiment impossible de trouver des personnages ou situations identiques dans la réalité ; toutefois, si d’aventure, par une affreuse coïncidence, il arrivait que certains se reconnaissent dans certaines de ces créatures, alors c’est qu’ils auraient pleinement mérité d’être démasqués par un Destin justicier ; et qui sait si, par la même affreuse coïncidence, il n’y aurait pas des victimes ou témoins qui ne manqueraient pas d’ouvrir tout grand des dossiers (de plusieurs centaines de pages peut être…) ? Soulevant allègrement un tas de lièvres dans un vrai panier de crabes.  

     

                                                                     

                                                          LE LYCEE D’ELISE

     

        Cette nouvelle fait partie d’un roman, lui-même situé au sein d’un ouvrage plus général  (Main Basse sur l’Instruction Publique) qui traite de situations, de faits et de personnages imaginaires dans un pays imaginaire; on y voit, entre autre, les choses les plus révoltantes et  invraisemblables : vote politique odieux dans les classes d’un lycée, incitation des élèves à aller manifester plutôt qu’à travailler; on y voit aussi des enseignants à la fois «grandes gueules » et sous diplômés, des administratifs corrompus, beaucoup de fanatisme  politique,  injustices, passe-droit, lâcheté et servilité, mise en quarantaine, harcèlement et discrimination, discours hypocrites parlant de tout le contraire de ce qui se tramait sournoisement; le tout baignant dans une imaginaire et inimaginable ambiance de serviteurs officiels de l’Etat trahissant en douce leur devoir et, par conséquent, grugeant les contribuables qui les paient.

    Mais il ne faut pas croire que dans ce pays imaginaire la totalité des fonctionnaires étaient les mêmes. L’accent est simplement mis sur ceux qui n’étaient pas à leur place et qui essayaient de pourrir les autres, dont une partie résistait dignement. Quel que soit le nombre des « exactions » dont il est question dans le roman, aucun amalgame ne doit être fait entre ce nombre et celui des fonctionnaires crapuleux du pays de Turpitudam.  

     La seule façon, peut être, d’arriver à imaginer cet inimaginable, est de se rappeler la propagande faite sous les régimes communistes et nazis, par des gens qui, exactement comme ceux cités dans le roman, n’acceptaient jamais de discuter un tant soit peu avec ceux qui ne pensaient pas comme eux, et condamnaient d’emblée pour seul « délit d’idées » des gens (qui  sont leurs collègues dans le roman) ne leur ayant fait aucun mal : on reconnaît ici les glorieux imbéciles partisans de la pensée unique, se serrant lâchement les coudes pour être bien couverts (fédérés, diront les sophistes), ayant pour seul argument la consigne bien apprise de couper systématiquement la parole à ceux qui voudraient s’exprimer différemment d’eux.

    Bien sûr un tel roman peut dévoiler le rôle du fonctionnariat de ce pays imaginaire, et même le remettre en question, surtout lorsque certains (voire trop) de ses membres sont des âmes mal nées à qui la valeur se refuse en dépit des années.

    En fait Elise,  petite ville de cette contrée, le Pays de Turpitudam, jusque là paisible, en apparence tout au moins, avait de haute lutte obtenu la réhabilitation de son Lycée, par une ténacité justifiée, et peut-être aussi par une attitude politique bien orientée: et ici je donne au mot  "politique" son sens originel et noble d’ « administration de la cité », et non point le sens de "politicard" comme on le trouvait souvent dans les faits et journaux depuis quelques décennies. Il faut dire que le nouveau maire d’Elise, qui l'est encore d'ailleurs à la fin du roman, s'évertua à amplifier, contre vents et marées, l'essor de son Lycée; essor auquel il tenait encore malgré les tentatives de sabotage, par endoctrinement surtout, de tout un groupe de gens pensant comme le Pouvoir (appelé officiellement dans ce Pays Pouvoir Educatif Régional, nous dirons rectorat pour simplifier). C'est ainsi que se nomme, dans ce pays, l'autorité hiérarchique de la grand-ville régionale la plus proche et correspond à un rectorat en France: les membres du Pouvoir sont choisis par cooptation pratiquement dans un seul parti politique (deux en réalité, mais qui sont en fait d'accord pour n'en former qu'un seul): et ici j'entends "politique" au sens de politicard.

    Dans ce Pays le Pouvoir National de l'Enseignement est un Etat dans l'Etat: depuis les années 60 en effet sont appliqués, et de plus en plus souvent, des pratiques et règlements anticonstitutionnels et surtout, depuis le début des années 80, c'est toute une faune qui fait sa loi au vu et au su de tout le monde. Certains chefs ou sous chefs des Pouvoirs régionaux (appelés recteurs en France) n'hésitent pas à violer le règlement, à utiliser le chantage et, bien entendu, le piston;  les passe-droit et les mensonges sont monnaie courante pour ces « recteurs » et les membres et sympathisants de la pensée unique qui est celle du Pouvoir Educatif, i.e. la bonne pensée; toute cette faune « dirigeante » ne cesse de se vautrer dans le          

    mensonge à des fins cupides, sans reculer devant une quelconque injustice, comme en a donné un triste exemple un responsable de petit ordre dans ce Pays, qui sévissait là, et qui a su faire beaucoup de mal, Mme Taxit, arrivée à ce poste on ne sait pas comment (vu sa conduite et son manque total d’éducation, comme nous le verrons) ; elle avait ainsi pu assouvir un instinct de puissance plutôt que d'avoir été capable de compétence.

    Cette Administration est en cheville avec celle de distribution du courrier Turpidammais et peut ainsi se permettre de tricher sur des lettres recommandées qui, soit « se perdent », soit ont beaucoup de retard, soit ne trouvent pas leur destinataire (même bien connu) et retournent à l’envoyeur… qui, lui,  n’a pas, contrairement à l’Administration,  la poste pour complice.  

     Dans les fonctionnaires employés par le Pouvoir il y a déjà les membres officiels, entrés par concours, et ceux entrés par simple nomination. Bien sûr, dans une écrasante majorité, ces gens là ont bien suivi les consignes pour obtenir un bon poste; ils ont dû déjà au départ  montrer patte blanche. Hélas nous ne manquerons pas d'occasions de revenir là-dessus: la patte blanche consiste d'abord à employer un langage choisi par les bons penseurs et à tenir des propos conseillés; par la suite, au nom de la démocratie, on doit poursuivre son rôle en dénonçant à voix basse les mauvais penseurs et en fustigeant à voix haute toute attitude ou pensée contraire à la pensée unique. Je ne citerai pas le sketch français bien connu ---  auquel on peut faire allusion, du fait que cette contrée imaginaire a des mœurs et institutions semblables à celles des pays occidentaux ---, sketch où il aurait très bien pu être demandé quelle était la différence entre un bon penseur et un mauvais penseur: la réponse aurait été, bien évidemment, qu'un bon penseur est quelqu'un qui pense bien… et qu'un mauvais penseur est quelqu'un qui pense… mal! 

     Il y a ensuite les membres officieux, appelés syndicalistes, chargés en principe de défendre les intérêts de leurs collègues. Ils sont élus plus ou moins par ces derniers mais n'arrivent à des postes de responsabilité que par le fait du prince et qu'en suivant les consignes du Pouvoir. Comme ils sont probablement de valeureux employés de l'Etat (sans surcroît de travail bien sûr) et de très bons pédagogues (qui ne voient guère, et parfois jamais, les élèves), c'est ainsi qu'ils arrivent à se soustraire au dit travail et à la dite présence des élèves, pour œuvrer plutôt en palabres et en réunions; ils sont en moyenne moins (ou beaucoup moins) diplômés que ceux qu'ils sont sensés défendre, ils ont leurs petites et grandes entrées dans les locaux du Pouvoir et finissent pratiquement tous leur carrière en gagnant plus que leurs

     

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    collègues du même grade, tout en ayant le plus souvent  obtenu ou amplifié leurs titres sans

    jamais avoir passé de concours d'accès, mais par simple "choix du prince"; il est évident qu'ils ont passé beaucoup moins de temps que les autres « dans l'arène », en face des élèves. Véritables traîtres, au Pays de Turpitudam, on les appelle carrément des collabos (en souvenir des kapos et des membres subalternes de la nomenclatura). Il est inutile de dire que si ces gens là, eux aussi, ne pourchassent pas les mauvais penseurs, alors ils ne font pas long feu dans leur planque! Les énormes financements dont bénéficient ces syndicats dans ce pays sont

    d'origine non avouée (probablement parce que non avouable), bien que payés par les impôts des citoyens ; et cela est voulu par les gouvernements »bien pensants » mais se déroule au nez et à la barbe des autres gouvernements qui préfèrent l'injustice et la violation des règlements au risque de troubles dans la rue. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle un certain gouvernement installé il y a plus de trente ans avait accentué l'asservissement au Pouvoir de ces fameux syndicalistes, pour les faire devenir, dès cette époque,  les intermédiaires entre le Pouvoir et les moutons qu'il faut garder bien sages et toujours dans la même direction d'idées, idées dites démocratiques et anti-discriminatoires; ces idées consistent en particulier à isoler (éventuellement montrer du doigt) ceux qui n'abondent pas ostensiblement dans le sens donné par les sophistes au mot démocratie : sont donc mis à l’index « pour délit d’idée » ceux qui respectent sincèrement toutes les idées, en un mot ceux qui n'acceptent pas la pensée unique et qui sont contre la discrimination. Et petite gloire est à celui des kapos qui criera le plus fort qu'il faut être démocrate! qu'il faut  contribuer  à la lutte contre la discrimination, contre l'étroitesse d'esprit et contre ceux qui n' ont pas des idées démocratiques. D'ailleurs un des professeurs, Mr Asperges, avant de demander le Lycée d’Elise, avait passé un an dans un grand Lycée de la Capitale turpitudammaise, où les professeurs qui étaient « pour la démocratie et contre la discrimination » avaient carrément créé une salle des professeurs pour eux, et rien que pour eux,  laissant les autres refuser la pensée unique dans l'ancienne salle, et affectant de ne surtout pas parler aux collègues restés dans l’ancienne salle.

    En réalité le Chef d'Etat Tirdamterm, arrivé au pouvoir il y a trente cinq ans dans ce Pays, avait pensé qu' en fin de compte, si l' on voulait créer et conserver cette pensée unique, il fallait avoir ses milices de chiens de garde  à qui l'on donnerait l'apparence de bergers « éclairés », et qui seraient dans la réalité une sorte de kapos de son régime: il connaissait bien la question pour avoir su  prôner le contraire de certaines idées qui l’avaient porté au pouvoir ; ce chef du Pays Turpitudammais était très rusé et avait su passer d'une pensée unique à une autre en muselant ceux qui s'en étaient aperçus; il n'avait pas hésité à venir sur ordre en 1956, dans le sud de son Pays Turpitudammais, pour faire tirer sur des mineurs de fond en désaccord avec la pensée unique de l'époque...); il  avait fait assassiner plusieurs de ses amis prêts à parler (entre autre son directeur des chasses et un de ses ministres, compétent, honnête et issu du peuple, qui ne supportaient plus la façon despotique avec laquelle il gouvernait et osaient critiquer sa cupidité pour le pouvoir et l'argent, et aussi ses scandales financiers ; scandales dans l'un desquels, d’ailleurs, son propre fils avait été impliqué, etc...) ; ce président  avait aussi, en douce, fait menacer de mort un journaliste qui voulait faire paraître un livre sur sa double vie bien avant qu'elle ne  fût connue de la population; tout cela était connu  mais il y avait aussi des choses moins connues. Il avait en partie assis son accès au pouvoir, il y a trente ans, sur les enseignants, les « pseudo-enseignants » et assimilés, de ce Pays; d'ailleurs une immense  partie des postes de responsabilité, et surtout des places de parlementaires, avait été constituée dès son élection par des enseignants (même peu diplômés et souvent n'étant pas à la hauteur de leurs nouvelles responsabilités). Mais ces gens là pensaient bien et votaient encore mieux ! 

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    D’ailleurs dès son arrivée au pouvoir, il commença par faire brûler des livres qui ne lui plaisaient pas, et cela au nom de la démocratie et de la liberté d’expression…

    C’est aussi lui qui fit en sorte de rapprocher les syndicalistes de l’Administration,  pour mieux ligoter les fonctionnaires récalcitrants ; en un mot il achetait les syndicalistes pour les avoir à sa botte : quel régime totalitaire n’a pas fait cela à grand bruit !? Mais si on aime la « tranquillité », il suffit de faire tout cela sans bruit.

    Et ce fut alors le début du déclin culturel pour ce Pays, qui fut insidieusement plongé dans un obscurantisme d'où il ne risque pas de sortir de si tôt. Mais il ne faut pas croire non plus que c'est la totalité de la population qui est ainsi. Il n'y en a qu'une partie, « véreuse », qui essaie

    de gâter l'autre délicatement, gentiment, insidieusement, en remplaçant progressivement l'instruction par l'endoctrinement; mais un endoctrinement de toutes parts, et fait de manière excessivement sournoise; le seul emploi d'un certain vocabulaire montre bien  à quel point l'esprit fasciste a été inoculé dans le peuple de ce Pays: pour parler des gens de la pensée unique, on emploie deux mots de cette langue, qui se traduisent en français par « bien tourné »; ceci  est synonyme de « bien pensant » et de « politiquement correct », ces deux expressions  voulant dire exactement la même chose, en cela que leurs termes privent bien les gens de la liberté de penser et veulent les soustraire à la démocratie, qui est exactement le contraire de toute aspiration naturelle d’un quelconque peuple. Il est évident, mais beaucoup de citoyens du Pays de Turpitudam ne s'en aperçoivent pas, que le mot « démocratie » est le contraire de « exclusion d'au moins une pensée », puisque étymologiquement démocratie signifie « respect de toutes les pensées »: on n' a pas besoin d'être fin mathématicien pour comprendre que le contraire de « oui à toutes » c'est « non à au moins une ».

      A côté de ces créatures pourries il y a l'autre partie, assez nombreuse, de la population de ce Pays, qui se compose d'une part des gens déjà endoctrinés --- soit par bêtise ou fanatisme, soit par intérêt ---  et, d'autre part, des gens qui déplorent en silence cet état de fait mais ne réussissent pas à se faire entendre car ils tiennent à garder leur dignité, sachant qu'ils seraient obligés de la sacrifier en partie pour participer à l'empoignade et au dialogue de sourds que leur imposent les doux fascistes par leur mauvaise foi et leur pratiques de « grandes gueules assourdissantes ». Cette partie de la population qui se trouve ainsi opprimée, culpabilisée et dirigée par l'autre, laisse trop faire, par digne timidité et respectable tolérance. Pourtant certains commencent, au vu de ce qu'est devenue la société dans ce pauvre Pays, à regretter d'en être arrivé là, et de plus en plus cette partie lucide et honnête de la population met ses enfants dans l'Enseignement Privé qui, dans ce Pays, devient un refuge en quelque sorte; ceci fait que beaucoup se posent la question de l'opportunité et de la pérennité du caractère public de l'Enseignement ainsi que de l'utilité de dépenser de l'argent pour ne plus instruire mais pour endoctriner et maintenir dans une éducation à oeillères toute une foule de jeunes.                                                            

      Mais revenons maintenant au Lycée d’Elise.                  

    Ce petit lycée n'avait même pas cent élèves il y a trente cinq ans, lors de sa"reprise"par une Directrice, que certains disaient Dame de fer. Mademoiselle Lummerle était en fait une excellente Directrice, exigeante avec elle-même encore plus qu'avec les élèves, travailleuse, consciencieuse et honnête; une "lève tôt", à la barre avant tout le monde, tenant à tout, malgré un personnel plus que réduit: choix des classes et emplois du temps élaborés avec concertation et convivialité, ténacité et habileté à surmonter les problèmes financiers -- en toute transparence et toute honnêteté -- et à mettre en place toutes les structures qui peuvent exister dans une quelconque institution d'enseignement bien sûr. Et ainsi ce petit lycée commença à devenir grand. Il se mit à drainer avec convivialité et efficacité, outre les jeunes

     

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    d’Elise, toute une population d'élèves des petits villages, hameaux et campagnes environnants: élèves en général sérieux, travailleurs et bien éduqués. Dans leur majorité ils se sentaient autant responsables de leur propre avenir que de la réputation de leur établissement;  réputation qui, dans les classes scientifiques atteignit rapidement vingt lieues à la ronde! et notamment la grand-ville où se trouvait le Pouvoir régional, universités, etc… Il n'est pas étonnant que le travail de la Directrice, la volonté des élèves,  le niveau de l'enseignement et l'exigence des professeurs, aient contribué à donner au Lycée une réputation grandissante. 

    Mais un beau jour, le temps passant, cette Directrice prit sa retraite et fut remplacée par un

    Directeur, que l’on appela Proviseur.

    Cet homme, Monsieur Etanche, parut convivial dès son arrivée; bon vivant, aimant de toute évidence bien vivre (certaines mauvaises langues disaient qu' « il n'était pas tout à fait étanche... »), il avait en lui pas mal de compréhension et de bonté  envers tous les gens, et surtout un esprit de justice et de bonne foi.

    Bien sûr il se laissait un peu trop manipuler par certains enseignants (enseignants ou faisant office d’enseignants d’ailleurs, d'une compétence chancelante, mais politicards, pour compenser, donc soutenus et encouragés par le Pouvoir) ; il se laissait ainsi manipuler en particulier par excès de tolérance à l'absentéisme de ces enseignants et d'autres, et notamment lors d'une affaire grave dont nous allons parler ; il n'en dirigeait pas moins le lycée avec une certaine efficacité puisque ce dernier continuait à prospérer, surtout dans les classes scientifiques, et que sa notoriété ne cessait de grandir.

    Voici donc décrit le cadre de ce Lycée, au sein du cadre général du Pouvoir d'Enseignement.

    Mais un jour, fut nommé dans l'Etablissement un nouvel enseignant, Mr Néanderthal: n'ayant  jamais réussi, ou peut-être même passé , de concours, il avait été nommé dans le lycée comme enseignant-adjoint, faute de diplômes suffisants. Petit front étroit, très fuyant, il avait le Bat

    (dans ce pays le Bat est l'équivalent du Bac, du Bac d'autrefois  bien sûr, qui avait quelque valeur, vu ce que l'actuel est devenu, et est l'abréviation de Brevet d'Aptitude à Travailler); ce "professeur" devait probablement avoir deux ans d'université (peut-être  trois?); mais c'était un enseignant qui pensait très, très bien: aussi, par la suite, il termina sa carrière comme professeur en titre (possédant le grade du concours qu'il n'avait jamais passé) et certainement au meilleur des échelons de son grade! Tout cela grâce à son syndicat dont il était un membre fanatique; seule comptait pour lui la pensée unique ; et dans les discussions il remplaçait vite les arguments qui lui manquaient par des réponses bêtes et méchantes.  Il passa sa carrière à ne pas enseigner la véritable Histoire, mais à endoctriner, à l'aide de méthodes et d'arguments à sa portée. Son petit front fuyant et ses gestes mesquins (qui pourtant, en apparence, se voulaient très amples) laissaient bien augurer de ce qu’on pouvait attendre de sa réflexion…

      Cet enseignant se lia vite avec un de ses collègues, Mr Beffroy,  pour entreprendre ouvertement dans le lycée un endoctrinement soutenu et déjà entamé par son collègue. 

    C'est alors que les tracts continuèrent à circuler de plus belle, les grèves à éclore, des mouvements à s'amplifier, tout cela au détriment du travail, bien sûr, et de l'ambiance qui doit régner dans un établissement scolaire. Le proviseur laissait d'ailleurs un peu trop faire. Citons notamment quelques exemples, en commençant même par un fait anormal survenu déjà avant  même l’arrivée de l'enseignant-adjoint Néanderthal, et fomenté par son collègue, en poste depuis quelques années.    

      Un jour, juste après une élection nationale (et catastrophique pour le Pays), que ne découvre pas un professeur du Lycée,  Mr Asperges,  sur des tables d'élèves de la salle dans laquelle il vient d'entrer? des tracts sur lesquels était écrit que maintenant que les Bons Penseurs étaient arrivés au  pouvoir, les choses allaient aller beaucoup mieux, et l'Enseignement allait profiter

     

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    d’un nouveau souffle, dont les « Mauvais Penseurs » l'avaient privé jusque là". Ceci se passait le lendemain d'élections nationales! Elections qui se font aussi dans ce pays au suffrage universel; c'est la même chose qu'en France pour élire le Président du pays ; et c'est même mieux pour les élections des parlementaires, car dans ce pays il n'y a pas de triage des circonscriptions: tout se fait par proportionnalité, i.e. il ne peut y avoir, par exemple, dans une Assemblée, d'un côté 1 ou 2 députés élus par 3 ou 4 millions de citoyens, et d'un autre 20 ou 30 députés élus seulement par 100 ou 200 mille: les Turpidammais auraient trouvé cela foncièrement antidémocratique, au sens étymologique et non « politicard » du mot.

     Mais revenons aux tracts découverts ce jour là par Mr Asperges, et sur lesquels on pouvait lire : « le parti social vient de gagner les élections ; maintenant tous les avantages que le parti précédent vous a refusées vont vous être accordées ». Imaginez donc cela: quelle confiance accorderiez vous aux individus --- se disant"professeur"! ---  ayant distribué les dits tracts? et, de plus, imaginez que par la suite le changement promis dans le tract se soit avéré non exécuté ou bien ait été pire que le non–changement soi disant évité!  Dans ce pays imaginaire on peut en effet imaginer le pire; et, en fait,  préparez vous y, car, dans ce Pays, le pire, le bien pire, s'est effectivement produit!  

     Asperges donc, lisant ces tracts, fit part, à celui qu'il supposait en être l'auteur, ou un des auteurs, du mauvais aloi et surtout de l'illégalité du procédé utilisé (dans ce pays il était illégal, aussi, de se livrer à du prosélytisme politique dans des établissements publics, et surtout envers des personnes  mineures):  Beffroy lui répondit qu'il n'y avait aucun mal à cela, et qu'il n'y avait pas, non plus, la moindre arrière-pensée, car cette lettre n'était pas destinée aux élèves; c'était simplement une"lettre aux parents", que les élèves devaient remettre à leurs  parents…(certainement en se bandant les yeux, en la saisissant à tâtons et en la remettant à

    leurs parents dans les mêmes conditions; quitte à attendre, pour la lire, d' avoir atteint l'âge légal de la majorité…). Asperges dit qu'en tous cas il ne fallait plus faire cela, car un Lycée ne devait pas être un lieu d'endoctrinement mais devait être tout le contraire, c'est-à-dire un lieu où l'on préserve les jeunes de l'endoctrinement.  Du coup Beffroy et plusieurs autres collègues ne parlèrent plus tout à fait de la même façon qu’auparavant à Asperges.

    Ce dernier en effet, professeur de maths, paraissait un peu trop loyal, franc et "carré", et menaçait de devenir l'empêcheur de tourner rond pour ceux qui préféraient le cercle ---  surtout vicieux ou même déformé --- à des figures trop anguleuses. Il faut dire que ce Mr Asperges s'était déjà dévoilé lors de réflexions anodines (mais qui n'avaient pas dû tomber dans l'oreille d'un sourd) faites dans la salle des professeurs un an auparavant. Voici à ce sujet voici une petite anecdote: lisant un article de journal sur un heureux gagnant de la Loterie Nationale,  Beffroy avait demandé à Asperges ce qu'il ferait s'il gagnait ainsi ou bien s'il héritait d'un tonton d'Amérique; Asperges  lui répondit qu'il continuerait à enseigner les maths car cela lui plaisait beaucoup, et que, au pire, il se mettrait en demi service pour n'avoir qu'une seule classe à charge, celle qu'il aimait le plus. « Quoi?! » lui rétorqua son collègue; « eh bien si tu crois que moi je continuerais à venir faire le con ici pour gagner des miettes! moi, j'irais vivre sur une île, au soleil, et je n'en glanderais pas une ». A chacun ses goûts, lui répondit Asperges, sans trouver cependant la réponse de son collègue dénaturée, ne connaissant pas encore très bien ce dernier: il est en effet difficile de critiquer d'emblée quelqu'un qui aspire à vivre sans travailler; mais à condition que ce quelqu'un ne passe pas son temps à être payé par l'Etat,  tout en critiquant les "riches", et en poussant les gens influençables à se révolter au

    nom du"Droit au Travail"!, droit dont Beffroy se serait bien volontiers privé d'office, à condition de bien conserver celui d’être payé, droit il l’aurait revendiqué sans la moindre

     

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    manifestation dans la rue ou ailleurs, et surtout sans bruit! Il était du genre à préférer en son for intérieur le droit au salaire et à clamer haut et fort l’expression « droit au travail »…    

    Mais revenons à la nouvelle ambiance qui se mit à envahir le lycée; je dis "nouvelle" ambiance car,  comme je l'ai déjà dit, ce petit Lycée avait eu  très bonne réputation jusque là; et je dis "envahir"car le nouvel arrivant, enseignant-adjoint, avait beaucoup plus envie de prendre du grade et un véritable rôle politique (en faisant de ses cours et du Lycée une véritable tribune d'endoctrinement), que de faire prospérer, grâce à un travail rude et naturel, les deux immenses propriétés terriennes héritées de sa famille, l'une en  Turpitudam et l'autre

    à l'étranger.

    Bref, il ne tarda pas à se considérer comme le maître à penser du lycée. La plupart des

    enseignants firent allégeance: soit activement pour être bien vu du Pouvoir, soit passivement, par peur d'avoir à s'opposer à des agissements ---  voire exactions --- totalement illégaux.

    En effet très vite l'on vit se créer groupes "corporatistes" (équivalent des syndicats en France),

    créant des milices de profs et d'élèves, officiellement extérieures au lycée mais créées en réalité à l'intérieur. L'immense majorité des profs faisaient risette à tout ce beau monde, pour ne pas être montrés du doigt, même si certains ne faisaient aucune politique dans leurs cours.

    Il est bien évident qu'il ne faut pas mettre dans le même sac, par exemple, un professeur comme Mr Blanchet ---  professeur de physique, un des plus anciens, réputé à juste titre pour son sérieux, son exigence et ses résultats ---  et un de ses collègues, Mr Creux, de la même matière, arrivé bien plus tard, fervent suppôt des tendances résiduelles de bolchévisme, et qui en était arrivé à proposer aux élèves, à l’intérieur du lycée, de  verser de l'argent à une association de « soutien à la grève des élèves » : et il avait fait une petite recette! Ce Mr Creux en effet ne reculait devant rien: lors d'une des innombrables grèves survenues dans ce lycée il avait même menacé en pleine classe de "saquer" les élèves qui ne descendraient pas dans la rue avec les professeurs et les élèves grévistes! Il était évident, pour lui, que puisqu'il pensait bien, il avait le droit d'empêcher, en bon démocrate et par tous les moyens, certains de vouloir penser mal (ceci se passait à l'époque de la directrice Mlle Belette et bien après l'époque du Proviseur Etanche). 

    Et le leitmotiv était toujours le même, dans ce Pays de Turpitudam qui avait pourtant souffert, au milieu du siècle, autant du socialisme que du nazisme, comme dans plusieurs ex-pays satellites de l'ex-Urss; ce leitmotiv était: halte au nazisme (d’ailleurs on se demandait où, à ce moment là, on aurait pu trouver l'ombre d'un nazi dans ce pays là ; et seuls les imbéciles pouvaient en avoir une peur réelle, peur savamment inculquée dans les esprits plutôt faibles  ou dépendants par les « détenteurs de la vérité », c'est-à-dire les fanatiques de la pensée unique) ; on pouvait entendre, ou bien lire sur des pancartes : "faisons barrage au Fascisme"(au Fascisme des mauvais penseurs bien sûr, ce qui permettait de rameuter les esprits jeunes ou faibles et endoctrinés vers le Fascisme des bons penseurs, en vigueur dans ce pays, tout subordonné à la pensée unique et dix fois pire, c’est à dire la bonne pensée bien sûr.

    Bref ce "bienfaiteur de l'Humanité" local s'évertuait, autant que son ami Néanderthal, à sauver, par tous les moyens et tout en prononçant le mot de tolérance bien sûr, les pauvres élèves qui auraient été tentés de mal penser: merci, merci pour la postérité. 

    Et bien sûr ces gens là étaient inconditionnellement soutenus --- quoi qu'ils fassent --- par leur syndicat de façon officielle  (le plus grand était le Syndicat National de l'Enseignement Socialiste), et aussi par certaines associations de parents d'élèves, de façon officieuse (par exemple la plus présente : la Fédération Communiste des Parents d’Elèves).  

      Voilà donc expliqué l'état d'esprit qui était d'une part insufflé par certains enseignants --- qui

     

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    officiellement n'hésitaient pas à se qualifier de professeurs --- , et d'autre part refusé catégoriquement par un tout petit nombre, les plus récalcitrants étant Mr Asperges et un professeur d'allemand réputé d'ailleurs pour sa grande culture, germanique surtout, mais générale aussi (ce qui faisait des jaloux et ne plaisait pas à tout le monde). Il faut dire que la tendance était à privilégier, pour des raisons politiques essentiellement, la langue espagnole à la langue allemande.  

    Il faut dire aussi que, pour bien noyauter les élèves, ce Néanderthal allait avec certains collègues passer de longs moments au café avec les dits élèves (en dehors des heures de cours bien sûr).

    Un jour on vit arriver, pour enseigner le français, un ancien agriculteur sans trop de diplômes

    adaptés à l’enseignement des lettres, mais qui pensait bien, très bien; il était très gentil avec les élèves, mettait de très bonnes notes, mais ne connaissait pas grand chose et n’apprenait rien aux élèves (et cela au dire même de ces derniers) ; tout fier, il ouvrait grand sa grande  bouche pour dire à certains professeurs « bonjour collègue ».

    Heureusement que pendant ce temps le Lycée vivait, sans véritables scandale ou affaire de drogue; pas mal d'élèves étaient au-dessus de cela et ne prêtaient pas l'oreille à l'endoctrinement: ils travaillaient et arrivaient à donner au Lycée une très bonne réputation. Et cela non sans mérite car les difficultés et embûches ne manquaient pas. Par exemple il faut savoir qu'une année pour remplacer un professeur le rectorat (le rectorat était le lieu à où s'exerçait le Pouvoir Educatif régional) envoya un ancien médecin, Mr Tout de Go, certainement exclu de l'Ordre pour faute grave, pour  enseigner à des élèves de 15 et 16 ans. Comme certains en connaissaient plus que lui, il ne donnait que des notes au-dessus de 15; ainsi personne ne se plaignit trop énergiquement; mais, l'esprit de certains parents s'échauffant, vu que les élèves n'apprenaient rien, mais rien, on demanda, tout en conservant Mr Tout de Go à son poste, à Mr Asperges de leur faire des cours de rattrapage durant la deuxième moitié de l'année; ce dernier accepta et ainsi il n'y eut aucune histoire. Il faut savoir aussi que le mérite de beaucoup d'élèves ne s'arrêtait pas là: leurs conditions de travail au

    Lycée étaient assez spartiates,  pour le moins: comme je l'ai déjà dit auparavant il y avait des

    classes situées au fond du Lycée dans des préfabriqués, vieux, avec des gouttières quand il pleuvait, et mal isolés. Ces préfabriqués étaient en général occupés par les professeurs de maths, ce qui ne présentait certes pour eux que l'avantage d'être très loin des odeurs parfois pestilentielles du H2S, anhydride sulfureux, que manipulaient les chimistes dans les classes-laboratoires; mais pour ce qui était de la température, il fallait y supporter au printemps et à l'automne une chaleur étouffante, et l'hiver des températures négatives parfois jusqu'à 10 heures du matin, malgré l'énorme poêle à mazout qui rayonnait de tous ses feux, qui ensuite,  car difficile à régler, fournir une chaleur excessive. 

    Mais cet inconfort était loyalement accepté par tous, beaucoup d'élèves venant de la campagne d'où ils arrivaient et où ils repartaient par le car, tôt le matin et tard le soir.

     Bref la vie au Lycée à cette époque là était, pour une majorité d'élèves, studieuse et tournée vers l'instruction et la réussite aux examens et concours, ce que ne manquait pas de leur offrir ce bon et vieux Lycée, en remerciement, en quelque sorte, d'avoir été restauré dans son rôle.  

    En réalité un certain nombre des gens qui avaient lutté pour cette réinscription avaient fait cela dans un but tout autre, que l'on devine bien et que l'on devinera de plus en plus au fil du roman. 

    En effet dès son arrivée au Lycée ce Mr Néanderthal donna plus de place au prosélytisme politique qu'à l'enseignement laïque apolitique prévu par les textes en vigueur dans ce Pays

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    depuis le tout début du Siècle. Personnage rustre et vindicatif, car mal dans sa peau, il ne

    manquait pas d'insulter des élèves qui n'avaient pas la pensée unique pour bréviaire (notamment un élève passionné d'Histoire et qui en connaissais plus que lui sur certaines époques de l'Histoire de son Pays). Il lui était arrivé aussi d'insulter même leurs parents, sans avoir le courage de les nommer bien sûr, mais par des attaques du genre: « les commerçants sont des voleurs! quant aux agriculteurs, ils ne savent même pas pour qui ils votent ». Certains collègues, même de la pensée unique, avaient honte d'appartenir par force à la même corporation que cet individu, et tout le monde, témoins et victimes, prenait ces remarques d'où elles venaient ; mais cela était dur à avaler pour les parents commerçants ou agriculteurs, même si, dans leur for intérieur, ils se rendaient compte que ces insultes venaient d’un individu méprisable et vil qui usurpait un poste d’enseignant. Malgré cela des « risettes » presque craintives lui étaient faites par certains collègues, qui n'avaient aucune envie d'être mis en quarantaine par ce pur partisan de la démocratie car, comme beaucoup de non diplômés, grandes gueules à l'origine, et ainsi devenus hommes de main du Pouvoir, ce personnage était un délateur assez influent auprès du « bureau politique » officieux du Pouvoir régional, de par son militantisme au Syndicat National de l’Enseignement Socialiste. Mais ceux qui lui « faisaient risette » en avaient un peu honte ; exemple le prof de lettres, en poste au Lycée bien avant lui, qui, honteux et confus, dit un jour à Asperges : « tu sais, je ne connais pas Néanderthal plus que cela, c’est un collègue bien sûr… mais c’est tout ». Mais il faut dire aussi que le dit prof de lettres avait déjà fait quelques ragots quelque peu mensongers ; un jour il demanda à Asperges d’aider sa fille en maths, au motif qu’elle ne comprenait pas les cours du professeur qu’elle avait dans sa classe ; Asperges rendit ce service (entre collègues) avec plaisir (la fille était intelligente et travailleuse de surcroît). Mais quelques mois plus tard Asperges apprit que le dit collègue prof de lettres avait dit quelque peu du mal de lui, afin de se ranger du côté du Syndicat National de l’Enseignement Socialiste. A qui pouvait on se fier dans ce qui commençait à apparaître, au naïf Asperges, comme un panier de crabes ? mais des crabes assez particuliers, des crabes « instruits », c'est-à-dire capables de marcher dans tous les sens à la fois en laissant croire qu’ils marchent dans un autre sens… Et ainsi, chemin faisant, le Lycée d’Elise ne put que devenir hélas le théâtre de beaucoup de coups d'éclat sans rapport avec son rôle de prédilection qui était d’être un lieu d'instruction, ce qui à présent n'étonnera personne.

    Des mouvements d'agitation ne tardèrent pas à se faire jour, notamment en 1986 des grèves eurent lieu, grèves d'élèves bien sûr, ce qui permettait aux enseignants qui les y poussaient, de percevoir leur traitement tout en ne passant leurs journées qu'à faire des réunions, des assemblées générales de grève (fameuses AG!), où ils votaient et faisaient voter les collègues pour le soutien à la grève des élèves!! Il y eut même mieux: certains professeurs votaient « oui » par téléphone au soutien de la grève des élèves! Et l’on vit même une enseignante, qui habitait Portromain, téléphoner au Lycée pour dire qu'elle «  soutenait pleinement la grève des élèves »  ; elle n'avait donc pas besoin de venir (elle n' était pas gréviste officiellement, elle, donc elle continuait à percevoir son traitement: elle avait, comme on le comprend, tout simplement le courage et l'infinie bonté de soutenir les élèves dans leur juste mouvement de revendications; pendant ce temps les collègues meneurs expliquaient aux élèves ce qu'ils devaient dire dans les réunions de grève organisées dans la cour du Lycée. Et les élèves meneurs (qui n'étaient pas des premiers de classe, il faut bien le dire....) haranguaient leurs camarades sur une estrade parfois au milieu de la cour, ce qui pour eux devait certainement être, intellectuellement, aussi épuisant qu’instructif… Une femme, professeur adjoint enseignant l'italien (mais sans trop de diplômes et sans avoir passé de concours ; les élèves

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    fustigeant d’ailleurs son manque d’aisance en langue italienne) avait même refusé de faire cours pendant cette grève d'élèves ; elle l’avait refusé à un groupe d'élèves qui, eux, ne suivaient pas le mouvement et voulaient avoir réellement cours, et elle était revenue en salle des professeurs en disant: « des élèves  non-grévistes sont venus à l'heure de mon cours et je leur ai dit qu'il n'y avait pas cours ! voilà ! » ;  puis, s'adressant à certains collègues (qu'elle n'avait pas besoin de convaincre!), elle ajouta: allons donc, tu ferais cours toi à des gens qui ont voté pour des Chariciens? (terme venant du nom d'un Homme d'Etat, de ce Pays, qui « ne pensait pas bien », donc qui était une des cibles des fascistes de la pensée unique   turpitudammaise).

    Ainsi pratiquement quinze jours se passèrent sans que les cours aient lieu, à l'exception de ceux de Mr Asperges et de Mr Blanchet qui réussirent à faire cours à une majorité de leur classe. Une fois même ce fut seul Mr Asperges qui fit cours à une demi-classe dans un Lycée désert; d’ailleurs cela eut l’heurt de ne pas trop plaire… et, comme on peut le penser, le rapprocha encore plus de l’amour sans bornes que certains lui témoignaient. Une autre fois enfin aucun professeur ne put faire cours, faute d'élèves: le Lycée avait été vidé!

    Deux ans après il y eut un événement très grave, toléré par le Proviseur: un vote des élèves, totalement illégal, organisé par deux enseignants adjoints, Néanderthal et Malbatti. Ce dernier était nouveau venu, pas très diplômé mais très bien pensant, donc très bien introduit au lycée. Il paraît d'ailleurs que même chose illégale fut faite dans un lycée d'une ville voisine d’Elise.

    A deux jours des élections présidentielles nationales dans ce Pays et ces deux enseignants adjoints organisèrent un vote dans les classes du Lycée précisément le jeudi et le vendredi  avant veille du dimanche où avait lieu le véritable scrutin national. Ils distribuèrent  à chaque élève, avec la complicité de certains collègues, du Proviseur et du Proviseur adjoint,  des papiers où figurait la liste des candidats officiels, et où il était demandé aux élèves d’écrire pour qui ils voteraient (il est facile de reconnaître l’élève à son écriture…) ; on leur demandait aussi de dire s’ils savaient pour qui voteraient leurs parents s’ils ne pouvaient pas voter eux-mêmes, faute d’avoir atteint l’âge de la majorité : ceci était « pour faire des statistiques », et simplement pour faire des statistiques, comme ne cessaient d’alléguer les deux adjoints d’enseignement. Or ceci est non seulement pernicieux mais est formellement  interdit dans ce Pays là, comme en France et ailleurs bien sûr ! Et le dépouillement du vote devait avoir lieu (et eut effectivement lieu) le vendredi après midi au sein de chaque classe, de sorte que tous les élèves entendirent le nom du candidat le plus probablement éligible, nom qui était celui du parti des enseignants !

     Mais Asperges, réputé (et mal vu par conséquent) pour son opposition à toute politique au Lycée, qui avait eu vent de la chose au dernier moment, dit clairement le vendredi matin que cela ne devait pas se passer ou bien, alors, il ne laisserait pas se dérouler sans rien dire, en tant que fonctionnaire et citoyen, des actes aussi lâches et illégaux. Le vote - dépouillement illégal eut tout de même lieu en douce.  Aussi le lendemain du scrutin, le lundi matin, comme promis, Asperges recueillit beaucoup de témoignages d'élèves qu'il apporta à la garde nationale du coin (gendarmerie en France) et, à sa surprise, les renseignements généraux furent avertis.

     Ensuite il ne voulut pas créer d'histoire au Lycée d’Elise, déjà « remonté de ses cendres » et laissa tomber. Mais la peur et la panique furent grandes chez les coupables qui décidèrent de se venger, très bassement d'ailleurs (selon leur mentalité et leur manque de courage), comme on va le voir. Ces deux individus, Néanderthal et Malbatti, étaient envieux et jaloux, selon toute apparence, peut être pour cause de complexes assez profonds. Et ils essayaient de s’affirmer comme ils le pouvaient, à leur niveau, n’hésitant pas à ternir l’image traditionnelle

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    du Ministère Public dont ils dépendaient, Ministère qui était encore auréolé, aux yeux des gens, d’une bonne réputation, obtenue de longue date, de trop longue date en réalité : les choses avaient hélas  totalement changé !. 

    Quelques jours après, Mr Malbatti alla voir, en « pleurnichant », la garde nationale pour aller

    s'excuser, dire qu'il ne voulait en aucune manière  influencer dans leur vote du dimanche les élèves majeurs qui étaient électeurs, mais qu'il avait voulu seulement faire des statistiques...! et qu'il ne recommencerait pas, et que tout le monde devait oublier cette petite histoire, et que cela s’arrêterait là.. etc… Mensonges aussi lâches qu’indignes ! En effet sa démarche était beaucoup plus sournoise et  hypocrite qu'elle ne pouvait paraître, car deux mois après – c’était

    la durée légale de péremption administrative de la faute grave qu’il avait commise -- , il

    commit un acte d'une grande lâcheté: en effet, quelques minutes avant le début de l'apéritif de fin d'année, il distribua dans les casiers des professeurs, avec Néanderthal et peut être aussi d'autres collègues du syndicat fasciste de gauche, (celui de la pensée unique), des prospectus où Asperges était vilipendé: et ce dernier ne put pas répondre à cette manoeuvre dégoûtante car l'après midi même le Lycée se vidait pour les vacances. Mais ce n'est pas tout! Pour éviter qu’Asperges ne mette sa réponse écrite dans les casiers à la rentrée, le proviseur fit enlever tous les casiers pour les changer, pour cause de vétusté soi disant, et le remplacement dura plus d'un mois...!

    Mais il y eut bien pire par la suite ; un vendredi après midi, dans la salle des professeurs vide, ce Mr Malbatti, ancien boxeur engagé par le Pouvoir Régional, (équivalent du rectorat en France, et très politisé),  pour « enseigner » dans ce Lycée, essaya de provoquer Asperges par des allusions au dit vote organisé quelques mois auparavant ; alors  Asperges lui rappela spontanément que la distribution du papier médisant juste au début de la cérémonie de départ en grandes vacances, n’avait été ni très franche ni très courageuse ; il ajouta  qu’il ne trouvait pas très courageux non plus le fait que lui, Malbatti, auteur de l’illégalité commise, et semblant sur le moment sûr et fier de lui, soit finalement allé, quelques jours après « pleurnichouiller » à la garde nationale. A ces mots, Malbatti, comme fou de rage, lui répondit : mais comment tu  sais ça toi ?! » et frappa Asperges sans hésiter. Malbatti , ancien boxeur avait prouvé une nouvelle fois sa lâcheté et ses bas instincts. Quant à Asperges, après avoir été inconscient quelques minutes, il se réveilla, sanguinolant de l’arcade sourcilière, pour s’entendre dire timidement et hypocritement par Malbatti : « mais peut être qu’on pourrait s’arranger à l’amiable, puisqu’on est seuls et tu n’as aucun témoin que c’est moi qui t’ai frappé » ; alors devant une mauvaise foi aussi ordurière, il riposta et blessa Malbatti à la gencive ; mais il eut tort d’agir ainsi, sur le coup de la colère, car tous ceux des Syndicat ou favorables à la pensée unique (en premier le Syndicat National de l’Enseignement Socialiste) allèrent dire que c’était Asperges qui avait frappé Malbatti le premier, répandant la fausse nouvelle le plus sournoisement et le plus loin possible dans toute la ville et avec la même mauvaise foi : bien sûr c’était Néanderthal et Beffroy, qui, connaissant beaucoup de monde,  brandissaient bien haut l’étendard du mensonge. L'infirmière, qui était de connivence,

    s’était bien gardé d’accompagner Asperges (qui était le plus blessé) chez le médecin du Lycée ; mais par contre elle y avait accompagné Malbatti. On aurait pu croire que ce Mr Malbatti était un simple pauvre type, mais non: c'était un revanchard et un assassin en puissance: en réalité Mr Asperges avait bien perdu connaissance quelques minutes sous le coup de poing de l’individu boxeur, et pendant ce laps de temps Malbatti, qui avait peur des

     

     

     

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    conséquences éventuelles, échafaudait déjà un moyen  de s’en sortir en s'arrangeant à l'amiable, au lieu de secourir Asperges comme l’aurait fait quelqu'un de suffisamment digne et de suffisamment viril, quelqu’un notamment qui aurait agi simplement sur un coup de colère et non par préméditation (de la même manière que quelques mois auparavant il était allé « pleurnichouiller » à la gendarmerie de façon bien préméditée, pour éviter tout soupçon de revanche de sa part). Comme les lâches,  il n'avait en tête que la peur d'être pris. Malbatti s'était en réalité bigrement comporté comme un assassin peureux.

    Disons quelques mots de psychologie : dans ce pays là certains attribuaient aux enseignants une certaine puérilité et un comportement mesquin ; mais faut il croire que des créatures du genre de Malbatti étaient simplement puériles ou mesquines ? ou bien étaient en même temps des créatures indignes et méprisables ?     

     Et là il y a une ressemblance  indéniable entre le roman et la réalité: en effet le recrutement

    de Malbatti, pour enseigner en Pays de Turpitudam, est tout à fait comparable à celui, fait en

    France, de Cesare Battisti, assassin des brigades rouges bien connu et condamné par la

    Justice, qui avait été recruté ponctuellement, malgré son passé tristement connu, par une mairie de France, très très « politiquement correcte bien sûr »; il avait été recruté comme « intervenant » dans des établissements pour enfants de la région; cet individu pouvait ainsi « semer la bonne parole » -- et surtout la parole unique -- dans la prime jeunesse! Eh oui, incroyable mais vrai ! Tous les détails et le nom de l’institution régionale en question peuvent être connus par ceux qui le désireraient (références du journal qui l’a publié).

    Les deux compères Malbatti et Néanderthal, qui se comportaient comme des créatures sournoises, bornées et fanatiques, étaient avec Beffroy et, plus tard,  le fameux Mr Creux, les quatre délateurs « de service » du lycée: ils transmettaient en amont tout renseignement (vrai ou faux, peu importe, mais destinés à nuire aveuglément à ceux qu'ils voyaient comme des ennemis) et appliquaient scrupuleusement le dicton « médisez, médisez, il en restera toujours quelque chose », ce en quoi ils furent bien aidés un peu plus tard aussi par le nouveau proviseur, Mlle belette, qui se révéla être de la même engeance, aussi perfide mais plus fine.

    Et la question se posait de savoir comment de tels individus pouvaient côtoyer dans ce Pays les âmes jeunes et malléables que l'on rencontre dans les Lycées...Vous me direz que ce pauvre Pays de Turpitudam ne peut plus maintenant s'enorgueillir de sa légendaire réputation de Pays où l'instruction était la plus vaste et la mieux dispensée. On devrait vider les poubelles du Public, pensaient nombre de gens très attachés à la culture et à la laïcité du système éducatif, mais, de dire à faire, il y a un grand pas.

    Enfin bref, revenons maintenant à la vie générale du Lycée.

    Malgré le mauvais état d'esprit manifesté, comme décrit, par certains « sous enseignants » dévoyés, il y avait des plaisanteries qui s'échangeaient, des anecdotes amusantes, et Asperges, bien que mis en quarantaine par les plus farouches opposants (en paroles) à la discrimination, avait de bons et loyaux collègues avec lesquels il rigolait de bons coups; certains étaient des pince-sans-rire, parfois surprenants d'ironie et de malice et avec lesquels ils rigolait un peu de certaines caricatures.

    Quant au Lycée, les grèves et « grévettes » avaient beau continuer de plus belle,  il n'y avait

    pas que cela qui privait les élèves de cours;  il y avait les absences d’enseignants responsables syndicaux qui allaient pour un oui ou pour un non à des réunions à droite et à gauche (surtout à gauche), tout en étant payés bien sûr par le contribuable.

     

     

     

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    Enfin, bon en mal en, toujours sous la direction du Proviseur Etanche, le Lycée continuait heureusement sur sa lancée, lancée qu'il avait reçue dix ans avant et qui aurait eu besoin d'être

    entretenue par les enseignants pour compenser la prévisible baisse de niveau qui arrivait.

    Ce fut dans ces années là que le pouvoir des chefs d'Etablissement  dans ce Pays fut accru et que les conditions de recrutement de ces chefs furent plus qu'allégées: on commençait à trouver moins de monde pour être Directeur; et le premier venu qui montrait suffisamment de docilité et de soumission au Pouvoir était choisi, même s'il n'avait que peu de diplômes ou (surtout…) peu de scrupules ; il faut savoir que les proviseurs ou principaux ne sont pas obligés de déclarer leurs  diplômes en Turpitudam ; les enseignants dont le titre est affiché (et là aussi on peut obtenir le titre d’un concours, comme le Capes ou l’Agrégation en France, sans jamais avoir passé le dit concours, mais simplement par piston , politique forcément ; et on perçoit le même traitement que les gens capables qui, eux, ont passé le concours !

    C'est d’ailleurs là qu'on vit l'incroyable se produire: en effet dans un autre Etablissement de cette ville turpitudammaise fut nommé un directeur qui n'avait qu'un diplôme qu'on obtient à l'âge de quinze ans (l'équivalent du BEPC en France) et qui, grâce au syndicat et au  lèche-botte, avait fini sa carrière avec le titre du plus haut concours de sa profession (équivalent de l’Agrégation en France, et même à la hors-classe); et cela sans avoir passé ni Bat, ni Bat + 3,  et encore moins le haut concours qui correspondait à son titre! Si l'on veut une comparaison avec la France pour mieux comprendre, c'est exactement comme si on engageait un directeur de collège n'ayant que le BEPC et qu'il finisse sa carrière agrégé hors classe (la  hors classe en France ne vient pas du tout du rang au concours mais intervient sur la rémunération et est attribuée au choix...); dans ce Pays de Turpitudam c'est le plus souvent la pensée correcte et la docilité à obéir aux ordres, quels qu'ils soient, qui donnait l'accès à la hors classe, pourvu que ces ordres viennent du « bureau politique » du Pouvoir: celle ci n'a aucun rapport avec la compétence du fonctionnaire en question ; et je dirais même que, pour un enseignant turpitudammais, faire passer la compétence et la qualité de son enseignement avant les consignes données par des supérieurs (qui, souvent, ne sont pas ou plus capables de conseiller en pédagogie), vous prive de la hors classe; car vous êtes considéré comme une forte tête, donc contre la pensée unique. L'on comprend aisément que, tout le monde n’étant pas privé de dignité au point d'accepter  de devoir passer sous le joug, alors tout le monde n'atteint pas la hors classe dans ce Pays de Turpitudam !

     Mais revenons à nouveau au Lycée d’Elise, qui vivait trop souvent des jours attristants et peu flatteurs pour lui, vu ce qu’il avait été auparavant, ce qui risquait de menacer sa réputation de petit lycée d’un très bon niveau, en sciences surtout.

     Un beau jour Monsieur Tanche partit à la retraite, vu son âge. Et c'est là que l'on vit arriver comme nouveau chef une directrice, Mlle Belette, pour prendre sa place. Allait elle remettre de l’ordre ? Allait elle éradiquer le mal et mettre l’emphase sur la réputation du lycée ? Quid ?

     On se dit tout d'abord qu'elle allait peut être redresser la barre, de la façon de maître dont Mlle Lummerle avait su, quinze ans plutôt, faire renaître le Lycée de ses cendres, dans l’efficacité et la dignité. Mais déjà le fait que cette nouvelle directrice commençât par user de son droit de Chef (en vigueur dans ce Pays) de ne pas afficher, contrairement aux professeurs, ses titres et concours dans la salle commune (ce qui lui évitait bien sûr de dévoiler des « manques »...), était de bien  mauvais augure...

    Et très vite on vit progresser et embellir ce qui existait déjà auparavant, mais à l’état latent ; en

    bref des élèves médiocres (ou plus !) « responsabilisés », voire soutenus en sous main, pour

     

     

     

     

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    faire courir des bruits, à l’encontre des enseignants récalcitrants.       

     La directrice commença par essayer de pousser Mr Asperges d’augmenter les notes des élèves, même si les copies ne les méritaient pas. Puis elle le menaça de risques sur le déroulement de sa carrière…Mais rien n’y faisait. Elle fit même venir un inspecteur régional, petit, assez complexé, qui proposa à Asperges de l’acheter, d’une façon détournée bien sûr : il félicita Asperges pour son travail et sa notoriété acquise, autant à Elise que dans un grand lycée de la capitale régionale où Asperges donnait des cours d’après bac ; il lui dit que lui, inspecteur, pouvait lui faire rembourser  les frais de déplacement pour aller enseigner à 100 km deux ou trois fois par semaine. Mais Asperges savait que cela était illégal et ne voulut point manger de ce pain là.

     Par la suite la directrice, bien que nettement moins diplômée qu’Asperges, n’hésita pas à prendre des prérogatives pédagogiques qui ne lui incombaient pas mais qu’elle pouvait  se permettre de prendre dans ce pays où la courtisanerie donnait tous les droits à la petite  hiérarchie qui était à la botte;  le pouvoir des directeurs avait été suffisamment accru pour qu’ils puissent se comporter comme des petits chefs obéissant aux ordres.  Alors la directrice  commença par lui refuser les meilleures classes et finit, plusieurs années après, par lui donner les plus mauvaises ; de plus elle s’entendit avec un père d’élève et la responsable de la Fédération Communiste des Parents d’Elèves pour que ces derniers envoient chacun de leur côté une lettre à l’inspecteur d’Académie disant que la sévérité des notes d’Asperges  barrait la route à certains élèves ; ceci était totalement faux car jamais élève méritant n’eut sa route barrée, bien au contraire ; mais, là encore ils ne manquaient pas de s’aider du même proverbe : «médisez, médisez, il en restera toujours quelque chose».

    Entre temps la directrice faisait des entourloupes à l’égalité entre les élèves aussi. Avantageant l’un, désavantageant l’autre, pistonnant ou brimant, sans scrupules et en toute impunité. Par exemple sa nièce vint faire sa scolarité au lycée d’Elise et elle n’était pas du tout forte en maths, bien que sérieuse. Alors Mlle Belette conseilla au professeur de maths de la classe où était sa nièce de veiller à ce que l’éventail  des notes soit plus « resserré » --- c’est plus pédagogique disait elle --- afin qu’il n’y ait pas de notes trop hautes ou trop basses… sa nièce y trouvant bien sûr son affaire ! Et le professeur en question s’exécuta bien gentiment, pensant à sa carrière.  Une autre fois, par contre, une élève sérieuse et capable, mais dont les parents ne pensaient pas bien --- ils étaient même sur des listes électorales très mauvaises, disaient des « démocrates » --- désirait préparer un bac sciences après l’obtention de son bac

    lettres; malgré l’avis favorable de son professeur de maths, les autres s’étant abstenus, la directrice n’accorda aucune mention encourageante sur le dossier de sa demande, et lui fit des difficultés pour la reprendre au lycée. En fin de compte l’élève obtint son bac sciences avec mention et finit par une thèse de spécialité mention très bien en biologie….

    Mais encore la directrice n’hésita pas à contacter le proviseur du grand lycée régional (lui aussi très « bien  pensant ») pour lui suggérer, de concert avec le rectorat, de refuser, lors de sa première demande d’admission en classe post bac,  le fils d’Asperges (qui était dans un lycée d’enseignement privé de qualité) ; et ceci grâce à la complicité d’un prof véreux. Mais, l’année suivante, on ne put décemment le refuser après une première année passée dans un autre lycée ; et par la suite le fils d’Asperges intégra quand même une Grande Ecole du Pays.

    Pendant ce temps là, les enseignants qui pensaient bien faisaient ce qu’ils voulaient sans être surveillés ; pour exemple ce professeur de philo rondouillet qui était très gentil avec les élèves. Et gentil à tel point qu’il prenait la peine de ramener chez eux, dans sa voiture, de beaux éphèbes… ; bref c’était un « amour de professeur » !

     

     

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    Il était évident qu’il y avait une réelle discrimination à l’encontre des enseignants qui ne voulaient pas passer sous le joug ; les petits chefs et les kapos ont leurs coups bas (on se demande ce qu’ils pourraient avoir de haut d’ailleurs) qui portent partout où ils peuvent, sur les récalcitrants eux-mêmes et sur leur famille : combien cela s’était il passé de fois dans l’empire communiste et sous l’occupation nazie dans ce Pays ! Pays qui avait souffert des deux fléaux (nous en avons connu de cruels exemples en France pendant la première occupation).

    La discrimination s’opérait aussi  au bac, i.e. bien au-delà du lycée d’Elise, pour les élèves venant du Privé, qui systématiquement étaient plus « fouillés » que les autres ! Et justement Asperges avait mis son fils dans le privé,  ainsi que certains collègues d’Elise, qui pourtant pensaient bien (ou plutôt bien). Asperges faisait son travail, beaucoup de travail, et n’aimait pas qu’on veuille ralentir son rythme. Et si, voyant ce qui se passait au niveau du Public, en premier lieu dans son établissement mais aussi à tous les niveaux,  il s’efforçait de colmater en plein naufrage les brèches du navire sabordé, quitte à rester le dernier à bord,  il ne voulait

    pas pour autant y inviter sa famille !  Et cela fit jaser, fit jaser…

    Mlle le proviseur, bien que moins diplômée qu’Asperges, était prête à créér tout traquenard et chantage qui pourraient lui nuire, en sachant jouer sur l’instinct grégaire des lâches qui pourraient l’aider elle-même dans de bien basses œuvres...

    Mais il y a bien d’autres choses à dire sur l’institution d’enseignement public turpitudammaise ; on n’arrête pas de ne pas en croire ses yeux, et chaque nouvelle page,  

    jusqu’à la fin, ne cesse d’être encore plus surprenante que les précédentes.

    Par exemple, et Asperges ne s’était pas plaint de la chose plus que certains autres enseignants à moitié horrifiés par la manœuvre, voici ce qui se passa dans toutes les classes inférieures du lycée d’Elise (par classes inférieures, au pays de Turpitudam, on entend classes post primaire mais avant l’âge de 15ans : cela correspond au collège et nous dirons désormais collège aussi), passa un employé du rectorat, chargé de l’orientation des élèves dans leurs études ; c'est-à-dire dont le rôle était de venir en aide à ceux qui n’étaient pas à leur place dans un enseignement général plutôt théorique, disons « intellectuel » ; il était chargé de conseiller à ces élèves d’autres voies d’études : des écoles pratiques, où l’on enseigne essentiellement un métier manuel, ce qui leur convenait mieux.

    Hé bien le dit « orientateur » (aux ordres bien sûr des syndicats communistes turpitudammais) ne passa dans les classes que pour inciter tous les élèves à demander de passer en classe supérieure c'est-à-dire à entrer au lycée (correspond à la 2nde en France) ; il leur dit ouvertement, à la grande stupéfaction de plusieurs enseignants, qu’ils passeraient en classe supérieure simplement s’ils le demandaient,  même s’ils n’avaient pas travaillé, même s’ils n’avaient pas le niveau. En outre on peut même ajouter que plusieurs élèves dont ils ne s’était aucunement occupé furent aidés et redirigés par des professeurs vers le métier qu’ils convoitaient ; ils furent sauvés grâce à des fonctionnaires consciencieux qui  remarquèrent leurs penchants et les écoutèrent, en plus de leur propre travail, afin de pallier à « l’incompétence fanatique » du dit orientateur qui se comportait comme un bien pitoyable fonctionnaire de la collaboration. 

    Ce comportement scandaleux, qui ne pouvait que contribuer à la baisse phénoménale du niveau général, venait en réalité d’un mot d’ordre des hautes instances de la pensée unique

     

     

     

     

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    (véritable Cheval de Troie dans le Ministère de l’Instruction Turpitudammaise) : ce mot d’ordre était « tuez la culture bourgeoise » ;  d’ailleurs, comme déjà dit, un collègue

    d’Asperges avait avoué à celui-ci que les maths modernes avaient été introduits en force à l’époque, afin de mettre les lettres (notamment la langue turpitudammaise) en veille ; tout cela bien sûr avant de les sacrifier définitivement ; ensuite ce fut au tour des maths d’être sacrifiés, et à quoi ? à pas grand-chose d’autre, vu le niveau d’inculture atteint par les élèves en Turpitudam.

    Chemin faisant, le lycée (classes appelées supérieures) acceptait donc n’importe quels élèves, bons, mauvais, intéressés, inintéressés, travailleurs, fainéants, honnêtes, tricheurs (impunis et

    impunissables bien sûr, sous peine que le professeur soit traité de sévère et que cela figure dans son dossier, à son insu ou non).

    Alors Mlle le proviseur ne trouva rien de mieux que de truquer le dossier de fonctionnaire d’Asperges afin de pouvoir un jour l’enfoncer davantage.  Mr Asperges étant connu de longue

    date pour arriver juste à l’heure ou un peu en retard  et cela régulièrement (bien qu’il partît très souvent bien plus en retard qu’il n’était arrivé, ne ménageant pas son temps pour renseigner un élève ou en aider un autre) la demoiselle se dit qu’elle pouvait utiliser déjà ce défaut pour lui en faire un premier grief.

     Alors un jour elle se posta près de sa classe, et attendit que le professeur arrive, surveillant les élèves de l’extérieur ; et quand il arriva, elle lui fit remarquer qu’elle avait pris les élèves en charge en l’attendant…Bien sûr, ce n’était pas pour lui faire honte de son retard, de près de 5

    minutes, car les élèves ne lui en tenaient pas rigueur, sachant qu’ils ne manqueraient ni de « soin » de la part de leur professeur, ni de travail, ni d’un bon niveau en fin d’année. Mlle Belette avait tout simplement voulu prendre acte de ce retard pour pouvoir consigner le  dit retard éventuellement dans son dossier au cas où Mr Asperges continuerait à refuser d’obtempérer et n’abandonnerait pas sa notation trop « vraie ».

    Et à côté de cela on avait pu voir, entre autre, une enseignante, très bien pensante (donc très

    bien vue même si pas très forte dans sa matière…), faire sauter une heure entière de cours en ayant dit aux élèves, dès le matin, que l’heure de cours de la fin de l’après midi serait exceptionnellement peut être retardée à cause d’un éventuel changement de salle : une fois la dite heure de cours arrivée, il n’y eut aucune raison de la retarder ou de changer de salle ; seulement les élèves, qui savent faire feu de tout bois, partirent dès la sonnerie, « séchant » ainsi le cours avec un motif tout prêt, à invoquer le lendemain ! l’enseignante ne les chercha pas longtemps… et partit une heure plus tôt. Et elle ne fut jamais interrogée le moins du monde sur cette escapade à moitié organisée (au nez et à la barbe de beaucoup de parents qui n’auraient guère apprécié la chose). 

     Mlle le proviseur fit aussi un faux, pour essayer de nuire à Asperges : elle tricha sur la date d’un document ; lorsque Mr Asperges alla voir la secrétaire, beaucoup pus tard, muni du document, il lui demanda d’apposer la date réelle à la quelle le document aurait dû lui être remis ; mais cette dernière, collaborant avec la directrice, lui dit qu’elle ne pouvait pas et que cela n’avait aucune importance ; Asperges lui répondit que si cela n’avait aucune importance administrative, l’affaire était close, tant mieux. Mais Mlle le proviseur en profita, plus tard, pour inscrire dans le dossier administratif que le professeur avait réclamé qu’on antidate une pièce ! (véritable mensonge)et voilà une fois de plus quel genre de proviseur l’Etat turpitudammais avait choisi pour diriger un lycée : pauvre pays…Cette demoiselle en fit d’autres, en l’occurrence elle n’hésita pas à falsifier une date de dépôt d’une lettre dans le

     

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    casier de Mr Asperges, lettre lui annonçant qu’elle n’avait pas eu connaissance de sa demande de mutation ! et elle mentait doublement : tout d’abord elle avait daté la lettre d’un jour où elle était absente du lycée (elle était au rectorat ce jour là et n’avait donc pas pu écrire la lettre), et d’autre part elle savait très bien, et depuis plus de deux mois,  que Mr Asperges avait bien obtenu sa mutation pour la prochaine rentrée (elle n’en était mesquinement que trop contente). Tout cela écoeurait Mr Asperges et en outre aucun des autres collègues n’était dupe de cette « méconnaissance » de son départ ; beaucoup ne disaient rien, par peur d’être mis à l’index eux aussi, et d’autres, du Syndicat National de l’Enseignement Socialiste, jubilaient en douce…de voir Asperges une fois de plus tracassé et isolé. 

    Mlle la directrice montait la tête à certains mauvais élèves afin qu’ils soient désagréables ou gênants avec Asperges ; d’ailleurs un jour l’un d’eux, particulièrement fainéant et sous doué, demanda à ce dernier s’il ne dépassait pas le programme ; mais Asperges se doutait d’où cela venait. Aussi, lors du conseil de classe suivant, il dit en pleine séance que certains faisaient courir le bruit qu’il faisait du hors programme ; et il ajouta qu’il fallait être bien

    imbécile ou malhonnête, ou les deux, pour croire ou pour colporter de telles balivernes !   

    N’arrivant toujours pas à se débarrasser de l’empêcheur de tourner rond dénommé Asperges, la directrice montait la tête aux élèves pour qu’ils essaient de le chahuter, pour qu’ils ne fassent pas les punitions qu’il leur donnait, ou les heures de colles ; elle lui donnait de mauvaises classes, s’arrangeait pour le faire changer de salle de classe plus que les autres ; un jour même, Asperges n’alla pas rejoindre sa salle où il y avait trop de résonance sonore, ce qui le gênait, et Mlle le proviseur, avec son aspect de petit chef, fut contrainte de lui en donner définitivement une autre le mardi ! Toute déloyauté était bonne pour essayer de le déboulonner, ce qui était dur car il avait une très bonne réputation de professeur de maths ; de plus il avait un poste ministériel, et pas simplement rectoral comme elle-même…et obtenu par véritable concours. Elle fermait même les yeux sur des élèves qui ne venaient pas aux cours d’Asperges, car ils ne voulaient rien faire en maths et Asperges faisait trop travailler…

    Et  pendant ce temps là, dans ce pays imaginaire, continuaient à se dérouler régulièrement des grèves d’élèves, soutenues par on sait qui ; on vit même le fils de la responsable de la Fédération Communiste des Parents d’Elèves --- responsable très bien pensante qui avait un fils très bien pensant ---, être absent pendant un mois (pour maladie) alors que dès la troisième semaine de son absence il défilait en plein hiver dans les rues d’Elise pour manifester ! il faisait un froid de canard ce jour là, avec un vent terrible, et il était même venu au lycée pour crier comme les autres et montrer ostensiblement à Asperges et à quelques autres collègues qu’il quittait l’établissement pour suivre les autres meneurs (dont il n’était pas le moindre).

    Lors de l’une de ces grèves la directrice n’hésita pas à refuser carrément de faire son devoir de responsable de l’ordre dans l’établissement : un professeur d’Allemand, très bon professeur et lui aussi « trop » exigeant, vit arriver dans sa classe des « grévistes » extérieurs au lycée, qui étaient rentrés comme dans un moulin bien sûr, et qui venaient pour vider les classes. Il le fit savoir sur-le-champ à la directrice ; mais elle lui répondit qu’il n’avait qu’à se débrouiller. Il f

    faut dire que des consignes , officieuses bien sûr, venaient du rectorat, pour laisser faire les grèves ; l’origine de ces consignes venant de beaucoup plus haut dans le Ministère, occupé par beaucoup de gens qui pensaient très bien et qui ne voulaient aucunement décourager les « grévistes » de penser bien à leur tour. Personne dans la hiérarchie en effet ne reprochait à la

     

     

     

     

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    directrice de laisser afficher et placarder des pancartes et banderoles illustrant les grèves, même des photos truquées dans la salle des professeurs… On vit même une fois Mlle le proviseur dans une attitude aussi pitoyable que déshonorante pour l’Institution Publique, dans la cour du lycée, tout près du portail d’entrée, assister à la « banderolisation » du dit portail, dont les élèves, accompagnés par des jeunes extérieurs au lycée, interdisaient le franchissement, au nom de la liberté d’apprendre à l’école publique. Par contre les empêcheurs de tourner rond, c'est-à-dire, dans ces périodes troubles, de « gréver en rond », étaient inscrits à l’encre noire au rectorat, et notamment Asperges, à qui l’on ne pardonnait pas d’avoir soulevé le lièvre lors de l’affaire du vote illégal dans les classes l’avant-veille d’élections présidentielles.

     Une certaine Mme Taxit, chef du personnel au rectorat, l’avait bien dans le collimateur ; c’est pour cela, entre autre, qu’il ne recevait certains imprimés ou dossiers administratifs qu’avec beaucoup de retard, avec une date d’envoi ostensiblement ultérieure à la date limite de renvoi.  Cette dame se comportait comme une véritable honte du rectorat.

    Et cela n’était pas le simple fait que, dans l’Administration, Courteline et ses ronds de cuir n’étaient pas morts , non, c’était bien le fait de l’existence d’une discrimination, politique

    avant tout, et d’un esprit grégaire de collaboration qui rappelle des temps qui  n’étaient pas révolus dans ce pays imaginaire…

    Et naturellement la directrice, petits diplômes, intelligence perverse comparable à sa très grande filouterie, s’entendait bien avec tout ce beau monde, qui ne voulait pas, du reste, lui avoir procuré son poste pour rien. Alors elle participait aux tricheries classiques et diverses : truquage de dates, truquage du dossier administratif d’Asperges entre autres, mensonges oraux et écrits --- médisez, médisez, dit le proverbe, il en restera toujours quelque chose --- ; pratique qui fut menée encore à plus grande échelle par Mme Taxit et ses acolytes au rectorat de la grande ville où plus tard Asperges obtint contre vents et marées la mutation qu’il avait demandée ; cette dame  mentait et mentait même dans des lettres recommandées !

    Bien sûr la plus part des secrétaires (à une exception près, qui avait suffisamment de  dignité), le proviseur –adjoint, les surveillants généraux (appelés en France conseillers d’éducation, on se demande pour quels conseils d’ailleurs, sauf si l’on considère qu’il en est de l’éducation

    comme des goûts et des couleurs…), les surveillants et certains employés de la cantine qui pensaient très très bien, passaient sous le joug,ou alors étaient pleinement consentants, pour la « traque » à faire à la moindre occasion ; et ce fut le cas dans la dénonciation mensongère à l’encontre d’Asperges lorsqu’il rendit les coups à Malbatti qui l’avait frappé en premier : il fut dit tout le contraire dans toute la ville d’Elise, où il fut colporté que c’était Asperges qui avait frappé Malbatti ! Un véritable faux témoignage, sous la houlette du responsable local du Syndicat National de l’Enseignement Socialiste à Elise, fut ainsi transmis en douce au rectorat, afin de nuire à Asperges tôt  ou tard  (toujours le même proverbe : médisez, médisez, il en restera toujours quelque chose !).

    Par contre certains personnages appelés pour enseigner, qui pensaient très bien, malgré leur manque, parfois assez conséquent, de diplômes, étaient très bien accueillis, et appréciés pour les bonnes notes qu’ils donnaient à tour de main (surtout lorsque certains élèves en connaissaient plus qu’eux): et là, beaucoup de parents (surtout ceux qui pensaient bien) étaien

    étaient comblés !

     

     

     

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    Voilà dans quelle ambiance de liberté, d’égalité et de fraternité se dispensaient l’enseignement et l’éducation  au lycée d’Elise. 

    Mais encore Asperges continuait à refuser de tricher sur les notes et appréciations des élèves, malgré la pression, malgré l’ostracisme dont il était l’objet (beaucoup de collègues ne lui parlaient pas, certaines secrétaires non plus) selon la technique courageuse du « tous contre un seul », même si on ne sait pas s’il a des torts et surtout sans lui avoir demandé sa version des choses  Alors la directrice décida d’utiliser un moyen classique et plus radical : elle fomenta un coup monté, avec la collaboration d’une mère d’élève, de deux délégués syndicaux du Syndicat National d’Action Laïque Concertée (dont un tout jeune, Krau Tin, nouvellement nommé au lycée qui, de plus , avait l’air franc de l’âne qui recule), d’un ancien instituteur devenu inspecteur d’Académie très obéissant, un inspecteur régional très complxé par sa taille, et enfin de la directrice adjointe, elle aussi toute nouvelle dans l’établissement et visiblement arrivée en étant « à la botte » et sans l’étoffe nécessaire à ses nouvelles fonctions. Mlle le proviseur  mit, dans la plus  mauvaise classe attribuée à Asperges, la fille en question, qui dès les premiers jour frauda lors d’une interrogation (pour créer un incident et accuser Asperges). Elle eut zéro, nia avoir fraudé (alors qu’Asperges l’avait clairement vu frauder), et n’arrêta pas de bavarder avec sa voisine. Asperges lui donna une punition, qu’elle ne voulut pas faire au début, mais qu’elle fit ensuite. La mère, alors, envoya une lettre à l’inspecteur d’Académie (qui n’attendait que cela) sans le dire à Asperges et sans prendre rendez vous avec ce dernier, bien sûr, car elle ne voulait pas que le coup monté soit annihilé dès le début par une entrevue « transparente » et utile. Tout cela avait été organisé par la directrice qui avait l’intention d’intimider Asperges en lui laissant entendre qu’une mère d’élève avait écrit à l’inspecteur d’académie. Mais Asperges ne fut pas intimidé du tout; alors il reçut une convocation du fameux inspecteur d’académie (qui n’avait que le bac mais était arrivé là à force de zèle dans la pensée unique et d’un  incessant lèche-botte envers sa hiérarchie) pour « une affaire le concernant ». Il s’y rendit et y trouva la directrice adjointe, un inspecteur pédagogique (petit, à semelles très épaisses, et réputé pour ses complexes, sa mesquinerie méchante et son orgueil), et enfin deux représentants syndicaux, tremblants devant la hiérarchie, et qui ne dirent pas un seul mot pour défendre Asperges, qui, de plus, était dans la réunion le seul à être aussi diplômé que l’inspecteur pédagogique, et beaucoup plus que l’inspecteur d’académie, que la directrice et son adjointe, et que les deux syndicalistes. Chacun parla à son tour, chargeant Asperges comme dans un tribunal (mais cela ressemblait à ces tribunaux d’exception qui trouvent tous les torts, les plus faux et invraisemblables, et où les juges ne sont que marionnettes obéissantes) : on dit à Asperges que s’il se mettait, comme

    Beaucoup de ses collègues, à donner de bonnes notes aux élèves (par exemple 04 ou 05 à une copie blanche…), alors la lettre de la mère d’élève serait oubliée ; en réalité la lettre avait été écrite par la directrice ! la mère était quasiment illettrée, comme elle sut le prouver par la suite. On ne lui donna même pas à Asperges la dite lettre ou une copie, car l’assistance avait plus ou moins peur d’un procès possible en diffamation, chantage et harcèlement. Mais lorsque la directrice voulut un mois après, faire signer à Asperges (avec la complicité d’une secrétaire , à la tête ronde (et l’air aussi franc que celui du traître dans les films américains à grand spectacle), une heure avant le départ en vacances de Pâques, le compte rendu de l’entrevue où il acceptait les conditions du chantage, il refusa tout net. Alors on lui dit que la lettre de l a mère serait versée  à son dossier.  Après avoir demandé au recteur qu’on lui en donne photocopie et avoir essuyé un premier refus, il revint à la charge et en obtint une photocopie … où le nom de l’indigne mère d’élève avait été effacé ! Il faut dire que les « accusateurs qui étaient à la réunion » n’étaient pas plus courageux que le DGRH et le secrétaire du recteur, qui agissaient sciemment et en douce dans l’illégalité en faisant un réel

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    chantage : il était écoeurant de voir dans ce pays de Turpitudam des fonctionnaires bien à l’abri dans leur poste et d’une lâcheté digne de celle des collabos communistes ou nazis.  Dans ce chantage (qui fut vain car le professeur ne céda aucunement) l’Administration fut  bien aidée par l’inspecteur pédagogique régional et deux syndicalistes…très tôt passés à la « hors classe » d’ailleurs…et appartenant au Syndicat National d’Action Laïque Concertée). 

    D’autres syndicats avaient aussi trahi Asperges, mais moins salement ; ils l’avaient laissé tombé par lâcheté et courtisanerie, les responsables voulant bien sûr conserver leur poste (complètement inutile aux syndiqués mais utiles à l’Administration qui se servait d’eux comme de kapos et, bien sûr, utiles à eux-mêmes qui avaient une juteuse planque aux frais du contribuable… ) ; il y avait aussi le syndicat de la Fédération Oeuvrante (bien sûr socialiste) dont le responsable académique jouait à la « grande gueule » pour soi disant défendre les « intérêts des travailleurs » du Ministère de l’Instruction, mais n’avait de vues en réalité que sur sa carrière, commencée et terminée sans diplômes suffisants pour enseigner mais avec un toupet qui lui donnait ses entrées partout et lui permettait de passer sa carrière de fonctionnaire loin des élèves, donc loin du véritable travail, et très près de la promotion « au choix » donc des avantages pécuniaires . Le Syndicat National de l’Enseignement Socialiste ne trahit pas Asperges de façon visible car ce dernier s’en méfiait en premier et depuis longtemps ; cependant le dit syndicat, en la personne de Néanderthal, dénonça Asperges en profondeur (au rectorat et dans d’autres lycées où travaillait Asperges) pour ses idées anti-pensée unique et sa personnalité de « forte tête », tête qu’il fallait faire tomber. Ce syndicat  était plus ou moins lié, au lycée d’Elise, avec le Syndicat National d’Action Laïque Concertée qui avait beaucoup aidé Mlle Belette contre Mr Asperges.

    L’autre syndicat qui trahit copieusement Asperges lors de son arrivée au Grand Lycée -- le trahissant autant, et pour les mêmes raisons de lâcheté de ses dirigeants, qui eux aussi faisaient partie pour les Turpitudammais, des « pourris de l’Etat » -- s’appelait Syndicat National de Collaboration Laïque et était dirigé par Rabéréné, arriviste, pareillement (qui ne voyait pas trop d’élèves lui non plus…) et qui passa très tôt à la hors classe pour ses « bons et loyaux services » rendus au rectorat, son « maître ».

    Qui aurait pu croire, dans ce pays, que des « fonctionnaires d’enseignement », considérés comme respectables par la plupart des parents d’élèves, pouvaient se comporter aussi bassement, et comme de vils maîtres chanteurs ?

    Et c’est là qu’Asperges alla voir un avocat, qui mit la mère d’élève au tribunal. Alors aide fut

    apportée à la mère par la directrice et la directrice adjointe, qui réussirent à faire reporter le procès et la directrice adjointe prévint même la mère (qui habitait à 300 km d’Elise de façon tout à fait inattendue) de ne pas venir encore car le procès était reporté. La mère en profita pour écrire une lettre au juge pour se disculper, mais une lettre digne d’une pure illettrée ! Aucun rapport avec le bon style (exactement celui de la directrice, qu’on appelait Mlle le

    proviseur) de la lettre envoyée à l’inspecteur d’académie…Bref, un an se passa et le verdict tomba : la mère condamnée ; verdict qui éclaboussait le rectorat la directrice et tous ses acolytes ! La malhonnêteté de la directrice était évidente : non seulement elle avait failli à son devoir en ne défendant pas Asperges (faute grave dans le règlement du Ministère de l’Enseignement turpitudammais), mais encore elle avait monté le coup  de toutes pièces pour essayer de nuire à Asperges.

    Quant à la malhonnêteté du recteur, elle avait brillé d’une évidence aussi belle déjà avant le procès ; en effet lorsque Asperges, comme tout fonctionnaire attaqué dans le cadre de ses

     

                                                                       

     

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    fonctions, avait demandé au recteur de lui payer sa défense en justice, il lui fut répondu qu’on ne jugeait pas le procès utile, donc qu’il n’aurait pas d’assistance juridique ! Et cette réponse, ce recteur turpitudammais la donna deux fois, et bien sciemment car il y va de son métier de

    connaître la loi: quelle malhonnêteté et quelle bassesse dégoûtantes pour un recteur…

    Asperges écrivit au Ministre, plus intelligent et honnête, qui annula la décision du petit recteur : premier camouflet. Le second fut la victoire d’Asperges au procès. Lorsqu’il s’agit de faire exécuter la décision et de faire payer frais et dommages à la mère, celle-ci disparut…C’est alors qu’un huissier (qui était un homme concurrencé dans Elise par un autre  huissier, une femme fort honnête), la rechercha, mais dans une ville où elle n’était plus… ; cela était pourtant écrit noir sur blanc dans le compte rendu, comme le lui avait montré Asperges ! et cela donna plus de temps à la mère pour s’éclipser définitivement ; on ne la retrouva pas et Asperges demanda le paiement des frais au rectorat : qui paya !  Bien sûr, dans ce pays là, c’était les impôts des contribuables qui payaient la somme due, somme qui n’était que la conséquence du coup monté contre Asperges par des fonctionnaires corrompus déjà payés par les contribuables. Vous rendez vous compte de la chose ? Et une affaire de ce genre n’était pas unique, loin s’en faut. Voilà pourquoi beaucoup de gens, dans le pays, de Turpitudam, « fuyaient » vers l’enseignement privé. Voilà comment se passaient les affaires d’enseignement en Turpitudam : les citoyens payaient de telles créatures, et avec l’argent de leurs impôts. Beaucoup avaient honte que le peuple soit autant dupé par des individus se montrant lâches et avides, qui étaient toujours les premiers mécontents, réclamant salaires et avantages (pour eux-mêmes) toujours sur le même ton : manque de moyens, manque de postes. «  Moyens » est un mot hypocrite qui signifie argent (fric tout simplement). Mais si face aux médias vous demandez de l’argent, cela fait mauvais effet ; alors que si vous demandez « des moyens » cela est déjà plus digeste pour le contribuable, car on ne sait jamais à quoi correspond le mot « moyens » : est ce pour des tables et des chaises pour les élèves (lorsque, par exemple ils en ont trop tagué ou cassé), est ce pour des livres (lorsqu’ils n’arrivent pas à lire couramment ceux qu’on leur a prêtés gratuitement), est ce pour des heures supplémentaires ? (heures de « soutien », dont l’utilité pourrait se comparer à des heures d’entraînement de culs de jatte au triple saut…) ; aïe aïe, terrain mouvant… on risque de dévoiler le pot aux roses, surtout si cela accompagne un autre cri dans la rue : « création de postes » ! Stop ! revenons au mot plus gentil, un peu flou mais très doux de « moyens », car cela est beaucoup plus défendable, à condition de ne pas dévoiler ce qui se tramait dans ce pauvre pays de Turpitudam ; vous pensez bien que pas un centième de la population ne se serait douté de l’existence de telles magouilles, injustices, mensonges et coups montés,  contre des enseignants qui voulaient faire leur travail en toute honnêteté et refusaient plein d’anomalies criantes : la falsification des notes, le favoritisme, la tricherie,la paresse, le laisser aller et enfin l’impunité totale en cas de mauvais comportement. Pas un centième n’aurait pu imaginer cela ; sauf ceux impliqués dans les tentatives de harcèlement, les faux témoignages, la politique et les syndicats turpitudammais qui étaient à la botte. 

    Quant à Asperges, lui, il avait demandé sa mutation pour un plus grand lycée, dans la « capitale régionale », trop écoeuré de ce qu’il avait pu voir dans un établissement d’Etat. Mais au moment de partir, juste avant le départ en vacances, l’inénarrable se déroula au lycée !

    Première anecdote, lors de la cérémonie de fin d’année : une liste des noms de ceux qui quittaient le lycée fut distribuée en long en large et en travers, et plus ostensiblement que d’habitude, mais on « oublia » de mentionner le nom d’Asperges, dont chacun savait depuis Pâques qu’il avait obtenu sa mutation ! Et oui, toujours dans ce pays de Turpitudam la majorité des gens croyaient que tous les enseignants étaient d’un assez haut niveau d’intelligence, d’éducation et de dignité ; eh bien loin s’en faut ! voilà des mesquineries méchantes, des attitudes haineuses et des mensonges qui prouvent tout le contraire. Figurez vous que, aussi bas que cela puisse paraître, de la part de Mlle le proviseur, celle ci déposa dans le casier d’Asperges un papier sur lequel était écrit à la craie (craie pour tableau noir) : « au revoir et à jamais », ce qui fit rire Asperges d’ailleurs, tellement il s’apercevait de jour en jour que la dite directrice était suffisamment sotte pour ne pas voir qu’Asperges était content de partir, et fier de partir la tête haute, sans avoir cédé au moindre chantage ; il était content d’être discriminé par le groupe de ceux qu’il jugeait comme la honte de la profession et du fonctionnariat turpitudammais.

    Mr Asperges écrivit alors au médiateur du rectorat, mais ce dernier, servilement attaché au recteur qui le nomme (en général en remerciement de « bons et loyaux services » d’ancien syndicaliste bon lèche botte), et qui le nomme dans des fonctions de planqué, fut par cela même obligé de trahir Asperges (sans le connaître bien sûr) : il ne répondit qu’un mois après, c'est-à-dire après la cérémonie de fin d’année ! se dégageant ainsi bien lâchement de son devoir de médiateur payé par le contribuable. Disons tout d’abord que le syndicaliste qui avait servilement trahi Asperges lors du coup monté, eut peur de  recevoir les reproches qu’il méritait pour l’attitude ordurière dont il avait fait preuve, et a tel point qu’il ne vint pas à la cérémonie de fin d’année : quel courage ! Pour l’excuser, Mlle la directrice dit (elle était habituée à mentir) qu’il était muté et était parti se présenter à son nouveau poste (ce qui était complètement faux).

    Mais voici la deuxième anecdote : l’inimaginable se produisit le jour de la cérémonie de fin d’année. Bien sûr le lecteur lit un roman, mais il va être étonné de nouveau s’il croit encore que le niveau de dignité et du respect de soi était un tant soit peu élevè chez les enseignants turpitudammais. Les plus piteux étaient ceux qui pratiquaient l’ostracisme et la dénonciation mensongère à la moindre occasion, pour pouvoir faire le mal, faute d’avoir été capable de lever la tête assez haut pour faire le bien, et de façon désintéressée.

    Chacun de ceux qui quittaient le lycée reçut un cadeau de départ, accompagné d’un discours plus ou moins long sur sa carrière prononcé par un collègue ; Asperges ne choisit personne dans ce rôle à son égard, ne voulant pas gêner les quelques très rares qui étaient les seuls à lui adresser la parole ; il faut savoir que la majorité des enseignants étaient du syndicat d’une grande obédience à la pensée unique et, à ce titre, se gorgeaient des mots « démocratie »,  « contre l’exclusion », « antiracisme », « égalité »,…mais j’interromps la liste sinon je ne finirai pas mon roman.

     Asperges obligea donc la directrice à inscrire son nom, comme de droit, quelques jours avant la cérémonie,… ;le recteur eut il un sursaut de honte ? honte de voir une directrice (qu’on appelait proviseur) ayant une telle mentalité et aussi peu d’envergure, ou bien eut il peur qu’un jour  cela fasse du bruit ? bref le nom d’Asperges fut inscrit et la cérémonie se déroula donc en présence d’Asperges, le professeur le plus ancien au lycée parmi ceux qui partaient (en mutation ou à la retraite). Ce dernier attendit alors que Mlle la directrice fasse un compte rendu du passage de Mr Asperges au lycée d’Elise, et elle le fit.

    Mais, comme je l’annonçais il y a quelques lignes, le comble se produisit lorsque ce fut le tour de Néanderthal d’écouter le discours qu’un collègue et ami à lui fit à son sujet ; alors il crut bon d’ajouter quelques remarques sur son début de carrière, disant qu’il aurait pu devenir footballeur s’il avait voulu (alors qu’il avait toutes les qualités d’un « anti-sportif » de haut niveau : il ne pratiquait en effet aucun sport, si ce n’est celui d’être assis lors d’innombrables réunions politico-syndicales qui lui valaient des absences légales devant les élèves) ; il se

    mit aussi à  raconter quelques anecdotes sur sa jeunesse « sexuelle » oui, « sexuelle » ! parlant

     

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    d’une rencontre galante en vacances dans sa jeunesse! (en avait il manqué jadis ?  en tous cas, qu’est ce que cela venait faire ici en pleine cérémonie de départ à la retraite ?) ; et il se mit à ajouter que son nom de famille, dans l’étymologie du dialecte du sud du pays turpitudammais, n’avait aucun rapport avec un mot patois de la région qui signifiait « petite cabane », mais signifiait au contraire «grand jet »… ; « grand jet » de quoi , ciel ? : tout le monde rit sous cape, tout en ressentant un certain dégoût pour ce comportement de guignol complexé, guignol qui ne comprit même pas la bassesse de son anecdote.  

    Se consolait il de complexes en faisant outrancièrement de la politique au lycée ? en étant méchant et mesquinement revanchard contre les gens qui n’avaient pas ses idées  et qui avaient de la dignité ? bref, personne en tous cas ne le plaignait car il était considéré par beaucoup comme haineux et mal dans sa peau, comme son compère Malbatti, cherchant tous deux la moindre occasion pour mentir ou dénoncer  mensongèrement afin de faire du mal à ceux qui avaient la sincérité de respecter toutes les idées..

    Ainsi, l’incroyable, lors d’une cérémonie dans un milieu que les gens auraient pu croire d’un niveau plutôt élevé, s’était  produit.

     Une fois passés quelques jours, pensant qu’il ne retournerait pas au lycée, Asperges se trouva encore stupéfait d’avoir découvert, et côtoyé durant d’aussi longues années, de telles gens ; individus voulant coûte que coûte imposer leurs vues et leurs décisions par des méthodes

    fascistes lors de grèves réitérées, monopolisant la parole dans les réunions de grèves, violant les règlements les plus élémentaires, mentant, menaçant les élèves, insultant certains parents (hors de leur présence forcément puisque les parents ne sont jamais sur les bancs dans les classes !) ; Asperges se dit : il faut être une belle ordure tout de même… pour insulter des parents devant leurs enfants qui sont sans défense et qui craignent des représailles. De même qu’il faut en être une aussi pour échafauder un coup monté de toutes pièces…Quel dégoût. Et pourtant, même après tout cela il n’avait pas tout vu encore dans cette institution.

    Pendant ce temps là se passaient encore d’autres choses dans l’Institution de l’Instruction Publique ; les syndicalistes puisaient dans le panier tout à fait odieusement ; ils y puisaient des places de planqué, des décharges de service d’enseignement et des indemnités indues. Par exemple voyons le cas du mari d’une tabagiste d’une ville du profond sud du pays ; il était déclaré syndicaliste et avait donc une décharge de service. Il allait de temps en temps à des réunions syndicales qui se déroulaient au centre administratif régional (équivalent de la préfecture en France). Il finit bien sûr par avoir une décharge totale de son service d’enseignement au profit de son activité de syndicaliste. Et à ce moment là il vint moins souvent ; en effet on le voyait dans cette ville du sud dans le bureau de tabac aux côtés de sa femme qu’il devait aider car l’affaire marchait bien. Pendant ce temps les contribuables lui payaient son traitement de « syndicaliste » ; et il fallait voir les notes de frais qu’il présentait pour ses déplacements, exécutés parfois en train mais déclarés presque toujours en automobile personnelle, à un  tarif tout à fait exhorbitant. Et ce personnage était très lié à une sorte de chef syndicaliste des responsables syndicaux de diverses administrations, peu diplômé mais suffisamment bien placé du côté des bien pensants pour « faire peur » au responsable administratif du département (équivalent du préfet), de par ses relations politiques !  L’enseignant syndicaliste  devant être élu (par d’autres syndicalistes du même panier de crabe) pour rester à son poste à la « préfecture » , il était venu exprès un jour, de la ville où il travaillait dans le bureau de tabac de sa femme (à près de 200km de la capitale régionale), pour s’inquiéter de sa réélection auprès du chef syndicaliste : il avait donc

     

                                                                             

     

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    fait un aller-retour de près de 400km, qui lui fut payé en frais de déplacements !

    Mais « l’encore plus incroyable »  se passait en même temps dans ce pays.

    Figurez vous que le ministre lui-même, au nom typique d’Europe Centrale, Kcaj Glam, ne trouva rien de plus éducatif que de créer ce qu’il appelait le « manège enchanté », utilisé dans certaines écoles primaires pour « éduquer » les enfants à la sexualité. Il s’agissait d’un disque, comme un présentoir, sur lequel étaient présentés en éventail des copies de sexes masculins : et les enfants assistaient à cette représentation, qu’on aurait pu qualifier de grandguignolesque s’il ne s’était pas agi d’enfants...

    Il faut dire que beaucoup d’instituteurs, surtout de la génération de l’époque, étaient très bien pensants et que certains poussaient le zèle jusqu’à faire tourner le présentoir. Il n’est pas étonnant que l’un d’eux, non opposé à ce manège, dans un tout petit village perdu du sud est turpitudammais, ait été, d’une part, vu en train de fumer une cigarette dans la cour de l’école, au milieu des enfants, et, d’autre part, qu’un jour il ait dit à une écolière que pour venir à l’école elle devait enlever la petite croix de sa communion catholique…

     On peut ainsi imaginer la haute idée de la morale, de la pudeur enfantine et de la laïcité de l’Ecole, que pouvaient avoir le dit ministre et le dit instituteur, loin d’être les seuls fonctionnaires de la pensée unique, héla, à être dans ce cas. 

    Enfin pour dépeindre encore mieux le dit ministre, oui, j’ai bien dit le « ministre »,  il faut raconter le racket auquel il se livra un jour chez un antiquaire de l’ouest du pays de Turpitudam. Arrivant tout hautain, lors d’une visite officielle dans la région, il fit un peu les magasins, entrant dans le magasin de l’antiquaire pour voir des meubles et, ma foi, en vit un un qui lui plaisait : quoi d’anormal à cela me direz vous ? Il voit une très belle commode, elle lui plaît, et il « l’achète » pour une somme équivalant à un peu plus de 50000 euros il y a environ 20 ans. Il dit en grand seigneur à l’antiquaire, tout fier du reste de vendre à un ministre, qu’il prenait la commode sur-le-champ et qu’il lui enverrait la somme sous peu (sans dire « merci mon brave » mais presque). 

    Une semaine se passe, puis deux, trois… et l’antiquaire ne reçoit rien ; il écrit à plusieurs reprises : rien ; il  se permet de téléphoner au ministère : Mr le ministre est toujours en réunion ;  il est débordé de travail le pauvre ! L’antiquaire continue de téléphoner, mais d’un autre numéro, et finit par avoir le ministre, qui n’avait pas pu se dérober cette fois là. Et que n’entend  pas l’antiquaire au bout du fil ? « votre commode, il vaut mieux  l’oublier si vous ne voulez pas avoir de contrôle du fisc ; de tout façon on sait très bien que les antiquaires ne déclarent pas tout ce qu’ils gagnent et qu’ils ne meurent pas de faim ». Oui, c’est le ministre de l’instruction turpitudammaise qui répondit ça, et c’est l’antiquaire qui perdit l’équivalent de plus de 50000 euros !! Le Ministre était un véritable voleur : en réalité c’était un type du milieu. Et voilà ce qui avait été chargé, pour un temps, dans ce pauvre pays, des fonctions de ministre !… 

    Enfin c’est dans cette ambiance que tout le panier de crabes de la pensée unique coopérait à détruire la culture bourgeoise au sein de la plupart des établissements ; ne cessant d’organiser une semaine sur tel sujet (sujet politique mais déguisé en sujet éducatif), une quinzaine sur tel autre, un concours sur le racisme, une conférence sur la Révolution, une semaine sur la « citoyenneté » etc…Par exemple l’organisation d’une semaine sur le Ché Guevarra ; papiers, dessins affiches tapissaient la salle de la documentation, la documentaliste ne travaillant à ce moment là que pour cela. Cela se passait sous la houlette (« dirigée » et dirigiste) de la dite documentaliste, totalement fanatique, casée là par le service politique de l’Institution ; d’ailleurs dès son arrivée au lycée, sans connaître Asperges (qui ne lui avait jamais fait aucun

     

     

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    mal !), elle ne lui adressa pas la parole, tutoyant d’emblée tous les autres enseignants ou presque – ce que faisait déjà le proviseur-adjoint de l’époque, très ami avec Mlle le proviseur.

    Il était proposé aux élèves de faire des « recherches » sur la vie du Ché, sur ses actions, sur son « sacrifice » et celui des guérilleros en général, se gardant bien de dire aux élèves que ces individus  enrôlaient de force des enfants de huit ans en leur mettant un fusil dans les mains et commettaient au moins autant d’atrocités que les troupes régulières, et cela dans l’unique but de mettre en place un régime aussi mauvais, si ce n’est pire. Jamais, non plus, un seul mot contre le communisme (qui a battu, et de loin, le record de morts dans le Monde). On ne faisait que fustiger le nazisme qui, à cette époque dans ce pays, n’existait pas plus qu’en France maintenant. Rabachage et fanatisation avaient lieu tous les jours. C’est cette mascarade qui se faisait à la place des cours d’histoire-géographie, de « sciences d’économie sociale », créés dans l’Institution par le Cheval de Troie des partis politiques de la pensée unique. On endoctrinait à tour de bras, au lieu d’apprendre, de transmettre naturellement le savoir : on vendait au Diable les âmes des enfants. C’était une véritable trahison, concoctée et organisée dans les hautes sphères par des éminences grises, et exécutée souvent par des hommes de main  en quelque sorte, hommes de main dont la carrière avançait bien plus vite que celle des professeurs qui voulaient faire passer le savoir traditionnellement et efficacement: le faire passer des plus anciens aux plus jeunes, le contraire étant impossible !  

    On put voir au lycée d’Elise une enseignante de lettres obtenir des heures d’enseignement dans l’enseignement supérieur après avoir participé à l’organisation d’une semaine sur la « citoyenneté », en ayant pris sur ses cours un temps fou (mais, me direz vous, il n’en faut jamais assez pour plaire) pour le gaspiller en pérorant sur la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen ; mais quels hommes, et quels citoyens ? des jeunes insuffisamment instruits, des esprits soi disant libres formés par des maîtres asservis? Quelle pitié.

    Dans ce pays de Turpitudam l’Institution d’Instruction Publique ne délivrait plus l’instruction

    due, elle distillait de la propagande politique, et avait fini par réussir à culpabiliser la majorité des élèves de ne pas être adeptes de la pensée unique.

    En tous cas, gare au professeur honnête qui ne voulait pas passer sous le joug ! car il avait contre lui non seulement toute la nomenclatura, mais encore un très grand nombre de collègues qui voulaient rester dans le troupeau, bien au chaud dans l’Institution, Institution qui voulait garder toutes ses ouailles – et le plus possible, quitte à créer des postes inutiles, avec même certains fonctionnaires payés à ne rien faire, voire restant chez eux,  comme on le verra dans la nouvelle qui suit celle ci – toutes ces « ouailles », contentes de toucher un traitement régulier, se serrant les coudes en toute occasion ; et toute cette foule constituait un énorme réservoir d’électeurs. Cela comptait beaucoup, beaucoup, dans ce pays où, finalement, une grosse minorité pouvait gouverner (et même  n’importe comment…), en jouant sur une majorité « achetée » en sous main ; voire à bas prix, si l’on tire des conclusions du fait que la plus grande manifestation de tous les temps, faite par les fonctionnaires turpitudammais, ne fut pas faite (pour ce qui est des enseignants) pour redresser le niveau des élèves (niveau devenu inexistant), loin s’en faut, mais fut faite au sujet des retraites… ; quelle noblesse dans leur rôle de fonctionnaires chargés de faire passer l’instruction…Et quel écoeurement pour les citoyens lucides !

    Voilà en quoi consistait la vie au lycée d’Elise ; le prochain chapitre va traiter de la vie dans un grand lycée (mais politiquement ce sera la même !) et montre de même qu’en pays de Turpitudam le recrutement des fonctionnaires les plus engagés dans le « progressisme » se fait dans un sérail d’eunuques – et ce ne sont pas certaines lois qui me feront mentir  – où la compétence et l’ardeur au travail ont cédé la place à l’allégeance et à la plus plate servilité.

     

     


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